Le Président de la Fédération française de golf (FFG) se représente à la fin du mois de décembre pour un second mandat de quatre ans. Le développement, l’écologie, les résultats sportifs tricolores… Tous les grands sujets ont été abordés. Il a été également question de l’avenir de la discipline alors que le PGA Tour et le LIV Golf ne parviennent toujours pas à se mettre d’accord. Pascal Grizot a peut-être la solution. Attention, ça peut décoiffer !
Propos recueillis par Lionel VELLA
C’est dans son bureau de l’Avenue de la Grande-Armée à Paris que Pascal Grizot nous a reçus en début de semaine dernière, juste avant l’exploit de Matthieu Pavon à l’US Open. Tout respire le golf ici, les tableaux accrochés aux murs, un grand sac avec des clubs bien en évidence, un tapis de putting-green pas loin… Pendant plus d’une heure, nous avons passé en revue ses presque quatre premières années de présidence et évoqué, bien sûr, les quatre prochaines, si évidemment il était réélu dans quelques mois. Mais pas seulement. La question de l’avenir du golf à l’international fait partie de ses préoccupations. Avec en toile de fond le bras de fer entre le PGA Tour et le LIV Golf. Un entretien passionnant avec un passionné de la petite balle blanche…
GOLF PLANÈTE : Quel bilan dressez-vous dès maintenant de ce premier mandat de quatre ans qui prend fin en décembre prochain ?
Pascal GRIZOT : Je préfèrerais que ce soit les autres qui fassent le bilan car si je le fais, on va dire que c’est prétentieux de ma part. Mais au-delà de ça, je considère que ce bilan est positif. On a démarré avec la crise du Covid. On avait face à nous un véritable challenge. Cela a été un vrai combat car on avait contre nous tout le monde. Le Ministère des sports disait qu’il fallait soit déconfiner tout le monde, soit personne. Les relations que nous avions tissées durant la Ryder Cup nous a aidés (Ndlr, Cyril Mourin, le Conseiller du Président de la République, était déjà à ce poste en 2018). Les clubs ont reconnu qu’on leur avait apporté un vrai service en leur obtenant des subventions pour mieux appréhender l’aspect économique. Les licenciés aussi… Après le Covid, la perception que pouvaient avoir les golfeurs par rapport à la Fédération a totalement changé. Elle est passée d’un organisateur de tournois de golf à un véritable support pour les clubs et les golfeurs.
G.P. : D’autres points de satisfactions ?
P.G. : Je pense aussi à la transition écologique et aux attaques de certains partis et de l’image du golf sur ce point précis. La FFG a là aussi défendu le golf. En ayant choisi de mettre en place une vice-présidente en charge de la transition écologique (Ndlr, Sylvianne Villaudière), on est passé à une vitesse supérieure sur les questions du développement de la biodiversité, sur les problématiques de l’utilisation des produits phytosanitaires…
G.P. : Et en termes de développement de la Fédération française de golf ? Satisfait aussi ?
P.G. : J’ai peut-être de la chance, je ne sais pas, mais cela fait trois années consécutives que la Fédération augmente son nombre de licenciés. Par rapport à d’autres Fédérations, on a eu l’avantage, surtout pendant le Covid, que le golf soit une discipline de plein air. On est une des rares à avoir établi des records. On a baissé de -3 % l’année de Covid, l’année d’après on a fait +9 %, un record, l’année suivante on refait 1 % et de nouveau 1% l’année suivante… Ce n’était pas arrivé depuis les années 80… Et pour être tout à fait complet, je voudrais ajouter qu’au niveau sportif, c’est la première fois qu’on a une joueuse qui occupe la 3e place mondiale et un joueur qui a atteint récemment la 20e place mondiale (Ndlr, Matthieu Pavon est repassé 20e mondial le 16 juin 2024). C’était aussi un objectif de la Fédération à mon arrivée à la présidence.
Si je devais être fier de quelque chose, c’est certainement de cette équipe qui a été construite au fil des années par Christophe Muniesa et qui, aujourd’hui, donne la quintessence de ses capacités.
Pascal Grizot
G.P. : Si vous vous retournez sur ces quatre premières années de présidence, de quoi êtes-vous le plus fier ?
P.G. : (Il hésite) Je suis fier de voir l’élan qui anime la Fédération. Oui, c’est sûr que j’impulse des projets qui n’existaient peut-être pas auparavant mais derrière ces idées, si je n’ai pas les équipes qui ne sont pas capables de les mettre en place, de contribuer à faire avancer le golf en France, ça ne peut pas fonctionner. Cette Fédération sous la direction de Christophe Muniesa, elle a toujours été très bien administrée. En termes de développement, pour la transition écologique, pour les centres de performances, notamment au niveau de la formation de nos élites, et tout ça c’est grâce à la qualité de nos équipes qui sont en place. Donc, si je devais être fier de quelque chose, c’est certainement de cette équipe qui a été construite au fil des années par Christophe Muniesa et qui, aujourd’hui, donne la quintessence de ses capacités.
G.P. : Quels ont été…
P.G. : (Il coupe) Il y a aussi cette fierté d’avoir réussi à rassembler toute la filière. La Fédération n’est pas isolée. On parle avec l’AGREF (Ndlr, Association Française des personnels d’Entretien des Terrains de Golf), les relations n’ont pas toujours été simples avec les greenkeepers… Aujourd’hui, je pense qu’ils comprennent qu’il n’y a jamais eu un président aussi actif pour défendre leur intérêt… J’ai fait une réforme dont mes prédécesseurs parlaient depuis 20 ans, c’est-à-dire donner la possibilité aux propriétaires de golf de voter pour le président de la Fédération… On l’a fait. Et c’est passer à plus de 90 %. Ce n’est jamais facile d’aller demander aux associations sportives qui ont aujourd’hui 100 % du potentiel de vote de le partager avec quelqu’un. Dans l’intérêt général, tout le monde l’a pourtant compris.
J’ai été le premier président à intégrer sur ma liste des membres de golfs commerciaux (GEGF) alors que tout le monde étaient issus auparavant des clubs associatifs. La filière est aujourd’hui unie, et c’est tant mieux. Pour arriver à remplir les challenges qui vont se dresser lors des quatre prochaines années et après, on a intérêt à être unis. On peut avoir de vraies discussions, même si on n’est pas toujours d’accord. On a fait notre job de pouvoir fédérer et on peut tous en être fier. Dans une période aussi troublée qu’en ce moment, avoir une Fédération qui est unie autour d’objectifs communs, c’est plutôt rassurant pour tout le monde.
G.P : Quels ont été les dossiers les plus délicats à gérer depuis votre arrivée à la tête de la FFG ?
P.G. : Il y a eu le Covid et j’en ai parlé en préambule mais je dois aussi évoquer le problème lié à la sécheresse qui a touché le pays en 2022. Cela a été très compliqué pour les greenkeepers de trouver des solutions quand on a dû faire face à l’interdiction d’arroser. C’est un dossier qui n’a pas été simple à gérer.
Je pense que c’est mon rôle d’aller dans ce genre d’émission (chez Cyril Hanouna), surtout quand on a les éléments de langages qui démontrent que LFI ou d’autres sont complètement hors-sol.
Pascal Grizot
G.P. : L’image souvent déformée du golf en France est-elle malgré tout en train de changer, d’évoluer dans le bon sens ?
P.G. : Je le pense, oui. Ces attaques qui sont infondées par certains nous permettent parfois de pouvoir discuter. Les affiches stupides de LFI m’ont permis de parler sur de nombreux plateaux. L’émission avec Cyril Hanouna, c’était quelque chose de nouveau. J’ai eu des retours positifs par rapport à cela. Ce que l’on cherche, c’est de parler à des non golfeurs pour arriver à les convaincre de venir jouer au golf. L’émission la plus puissante du Paf aujourd’hui, c’est celle d’Hanouna. Dire que je suis fan ou pas, ce n’est pas mon problème. Cela donne en tout cas l’occasion de donner une image différente que les gens peuvent avoir du golf. Et je pense que c’est mon rôle d’aller dans ce genre d’émission, surtout quand on a les éléments de langages qui démontrent que LFI ou d’autres sont complètement hors-sol.
G.P. : Où en êtes-vous avec les écologistes et autres représentants de la France Insoumise ? Les rapports se sont-ils apaisés ?
P.G. : On a parlé avec Cécile Duflot et Marine Tondelier. Elles ont accepté de nous recevoir. Un dialogue s’est installé. Et quand on est en face de gens ouverts à la discussion, on peut ne pas être toujours d’accord mais on ne peut pas dire que le golf, avec les éléments factuels qu’on leur apporte, est l’ennemi de l’écologie. Je pense qu’il y a d’autres ennemis plus importants à aller combattre que le golf… Des liens s’établissent. La preuve, quand il y a eu des marches sur l’eau et qu’un golf a été saccagé, Mme Tondelier nous a appelé pour déclarer qu’elle n’était pas solidaire de ces actions. En aucun cas, les attaques en parallèle de la marche sur l’eau étaient soutenues par Europe Ecologie les Verts. C’est plutôt positif.
G.P. : La transition écologique dans le golf est-elle inéluctable ? Tous les golfs de France pourront-ils répondre à cette transition, notamment avec cette loi Labbé (zéro produits phytosanitaires) qui doit entrer en vigueur au 1er janvier 2025 ?
P.G. : Ce que je souhaiterais, c’est de lancer un grand programme de recherche qui nous permettrait d’avoir des graminées qui seraient résilientes aux maladies qu’on traitera avec la loi Labbé. Mais ces dérogations, on ne les aura pas tout le temps. Je pense donc que ce serait bien, à terme, qu’on puisse avoir des graines qui soient résilientes à ce type de maladies. C’est possible d’y arriver avec la technologie qui existe aujourd’hui. Mais il faut y mettre les moyens.
Quand on regarde qu’un green de golf représente un hectare et demi sur la totalité du parcours, on a 700 parcours en France, ça fait 1 000 hectares. Il n’y a jamais en France une société de semence qui va se lancer dans une étude pour 1 000 hectares. 1 000 hectares, c’est à peine deux exploitations agricoles moyennes en France. Donc il faut que la FFG, mais aussi d’autres Fédérations, mettent en commun des sommes d’argent importantes pour pouvoir lancer ces recherches. Aujourd’hui, il y a des choses qui sont faites sur les gazons mais rien sur les greens de golf. Peut-être que demain, avec des graines OGM, on aura des greens qui seront résilients par rapport aux principales maladies… Ce sont des délais de cinq ans alors qu’avant on nous disait entre dix et quinze ans. Cela peut aller plus vite, je pense…
Aujourd’hui, je suis le seul président des dix plus grosses Fédérations françaises à continuer à être bénévole.
Pascal Grizot
G.P. : 500 000 licenciés pour 2025, c’est jouable ou non ?
P.G. : Non, je ne crois pas. Cela voudrait dire qu’il faudrait faire +10 % à la fin de l’année 2025. Non. Ce que l’on a essayé de faire durant le premier mandat, c’est de faire comprendre au golfeur, quel qu’il soit, qu’il ne prenait pas seulement sa licence pour faire des compétitions (Ndlr, il y a 650 000 golfeurs en France, dont 450 000 licenciés). Aujourd’hui, on a besoin techniquement de sa licence soit parce qu’on est dans une association sportive, soit parce que l’on participe à des compétitions. Le rôle de la FFG est plus large que ça, on l’a vu avec le Covid. Et on le voit aussi avec le problème de la transition écologique. Dans mon second mandat, j’aimerais aller chercher de nouveaux golfeurs avec une communication différente que celle que nous avons réalisée durant le premier mandat.
G.P. : D’où ce nouveau mandat de quatre ans en décembre prochain…
P.G. : Je suis avant tout un golfeur passionné. Dire que c’est tous les jours faciles, ce n’est pas vrai. Tout le temps que je donne en tant que président de la Fédération française de golf, je le donne gratuitement. Je ne suis pas payé pour ça. Celui qui se permettrait de mettre cela en doute, je lui dis : « Venez regarder les comptes de la Fédération, voyez à quel moment je peux prendre un seul avantage de ce que je donne au golf français. » Cela n’existe pas. Aujourd’hui, je suis le seul président des dix plus grosses Fédérations françaises à continuer à être bénévole. Si je le fais, c’est que d’abord je pense que je peux apporter une véritable contribution et ensuite c’est quelque chose qui me passionne.
Mais la passion a ses limites. Ce que je veux, c’est avoir des résultats. Il faut du temps pour y parvenir et en matière sportive, je pense qu’on peut faire encore mieux. Au niveau du développement et de la transition écologique, on peut aussi continuer à faire mieux. Maintenant, s’il y a quelqu’un d’autre qui veut se présenter…
G.P. : Justement, y-a-t-il des listes ou des candidats qui vont se présenter face à vous sachant que le délai pour déposer sa candidature est fixé à début septembre ?
P.G. : Pour l’instant, il n’y a personne. J’ai entendu qu’il y avait un promoteur de tournoi, à qui on n’a pas donné de subvention et qui a essayé de monter une équipe (Ndlr, il s’agirait de Julien Nazarian). Il ne comprenait pas pourquoi personne ne voulait se présenter contre moi. Il y a peut-être une raison. On attendra le mois de septembre pour voir si quelqu’un veut se présenter…
G.P. : Président de la FFG, c’est un travail à plein temps ?
P.G. : Oui, on peut le dire. Depuis que j’ai commencé à travailler à 18 ans, je n’ai jamais fait 35 heures. Donc, c’est plein temps par rapport à la base de Martine Aubry mais ce n’est pas plein temps par rapport aux capacités que je peux avoir. Je vieillis, j’ai 62 ans. Je n’ai peut-être pas la même énergie qu’il y a 30 ans. Mais je peux encore faire plus que 35 heures. Je passe au moins 35 heures par semaine pour la Fédération et le reste, j’essaie de le placer dans mes affaires. Celles-ci doivent être profitables pour que je puisse continuer à donner de mon temps gratuitement à la FFG.
Grâce à des discussions que nous avons eues notamment avec Claude Harmon, le fils de Butch Harmon, il pourrait s’occuper de superviser techniquement nos joueurs qui sont aux Etats-Unis, en collaboration avec Grégory Havret.
Pascal Grizot
G.P. : Matthieu Pavon est parvenu à gagner sur le PGA Tour alors qu’il est passé sous les radars des filières fédérales. N’est-ce pas ici quelque part un échec de la formation à la Française ?
P.G. : Matthieu a reconnu lui-même qu’il ne faisait pas partie des joueurs cibles. Si on me demande pourquoi on n’aide pas les joueurs qui sont 70e ou 150e français, c’est parce que si on donne un petit peu à tout le monde, on retire de l’efficacité. Le choix qui a été fait pour atteindre les objectifs est de concentrer nos aides sur les joueurs cibles. Ce qui ne veut pas dire que lorsqu’on est joueur cible à 12 ans, on l’est aussi à 14 ans. Si on n’est plus bon à 14 ans, on sort des joueurs cibles. C’est le système qu’on a choisi. Matthieu est donc passé sous les radars de la détection parce qu’il n’était pas dedans.
A l’époque, Benoit Ducoulombier nous disait néanmoins qu’il avait beaucoup de talent et nous avait demandé s’il pouvait l’associer aux entraînements avec des joueurs qui, eux, étaient des joueurs cibles. Il faut aussi préciser que Matthieu a commencé tard (le golf) car il pratiquait aussi le football et il a longtemps hésité entre les deux. C’était donc logique qu’il ait une maturité plus lente. A ce titre-là, oui, la Fédération n’aide que les joueurs qui sont les mieux classés.
G.P. : A l’inverse, Céline Boutier a, elle, suivi, cette filière qui l’a amené là où elle se trouve actuellement, c’est-à-dire à la 3e place mondiale (avant le dernier classement du 17 juin) avec une victoire en Grand Chelem… Avez-vous identifié d’autres joueuses ou joueurs qui pourraient ressembler au brillant parcours de la Francilienne ?
P.G. : Oui… La performance que Adela (Cernousek) vient de réaliser à l’US Women’s Open est fantastique. Chez les jeunes, on a des garçons comme Hugo Le Goff, comme Oscar Couilleau qui vient de gagner La Ganay. J’espère qu’on pourra arriver à nationaliser Lev Grimberg. A sa demande. Son père vivait en Belgique mais il a décidé de se rapprocher de la France et il a été partenaire en 2023 au Centre de Performance au Golf National. Depuis 2024, il est à 100 % formé au Centre de Performance. Il est toujours pour l’instant Ukrainien mais la Fédération a décidé par décision du Comité directeur de l’accepter même en tant qu’étranger parce qu’il a cette volonté de vouloir devenir Français. La demande de naturalisation qui a, dans un premier temps été rejetée, va être réexaminée après les Jeux olympiques.
G.P. : L’avenir du golf professionnel français se situe-t-il plus que jamais aux Etats-Unis via ses Universités ?
P.G. : Oui, cela fait d’ailleurs partie du travail de Grégory Havret qui nous rejoint officiellement à partir du 1er septembre en tant que responsable de la filière messieurs. On a une très bonne génération de joueurs qui ont moins de 16 ans. Elle va partir aux Etats-Unis mais on s’aperçoit que là-bas, on peut se perdre aussi. On est très aidé au niveau logistique mais un peu moins au niveau technique. Grâce à des discussions que nous avons eues notamment avec Claude Harmon, le fils de Butch Harmon (Ndlr, ex coach de Tiger Woods), il pourrait s’occuper de superviser techniquement nos joueurs qui sont aux Etats-Unis, en collaboration avec Grégory Havret.
Ce que je ne veux pas, c’est que Grégory Havret devienne un entraîneur. Il doit être le patron de la filière, à tous les niveaux. Que cela soit au niveau de la détection, au niveau des Ligues, de ce qui est fait dans les centres de performance et bien sûr dans les facs américaines. Il a cette vision globale sur tout ce qui doit être encore mieux fait pour aller plus vite et plus loin.
On n’est pas contre d’organiser un tournoi du LIV Golf en France. A ce titre, je rencontrerai Greg Norman pendant les Jeux olympiques…
Pascal Grizot
G.P. : FedEx restera-t-il plus de deux ans comme sponsor titre de l’Open de France ?
P.G. : Le contrat court jusqu’en 2025. Remercions FedEx de s’intéresser à l’Open de France. Si on veut exister sur la scène médiatique en France, il faut qu’on ait quelque chose de mieux qu’un tournoi classique du circuit européen. Mon travail se situe aussi au niveau international et de faire comprendre, comme l’a compris FedEx d’ailleurs, que la France est une parfaite plateforme pour l’organisation d’International Series.
Pour le moment, les Signature Events ne se situent qu’aux Etats-Unis. J’espère que le PGA Tour va comprendre qu’il faut s’ouvrir sur l’extérieur et que, si c’est le cas, la France est le parfait candidat pour recevoir une de ces séries internationales. Je me bats pour essayer de convaincre les instances internationales, et notamment le PGA Tour, qu’un tournoi en France serait la bonne solution. Comme on n’est pas contre d’organiser un tournoi du LIV Golf en France. A ce titre, je rencontrerai Greg Norman pendant les Jeux olympiques…
G.P. : Yasir Al-Rumayyan, le patron du Fonds d’investissement public d’Arabie saoudite, aussi, on imagine…
P.G. : Tout à fait. Je suis en contact permanent avec lui. On l’a encore rencontré il y a trois semaines avec Christophe Muniesa et c’est lui qui a accéléré les potentielles discussions pour un éventuel tournoi du LIV (en France).
G.P. : Y-a-t-il une volonté à la FFG de reprendre les rênes de l’Open de France qui est encore géré pour deux ans par le DP World Tour ?
P.G. : Avec le modèle actuel, je ne vois pas comment la Fédération pourrait reprendre les rênes. Comment je pourrais aller commercialiser un événement si je n’ai aucune garantie au niveau du champ de joueurs que je pourrais proposer ? Je ne peux pas fonctionner dans un système comme ça et il vaut mieux que cela soit l’European Tour qui s’en charge car c’est son produit. C’est lui qui a la main pour faire venir les joueurs. Ce sont eux qui font venir Justin Rose cette année au Golf National… Dans le calendrier de l’European Tour, l’Open de France est un rendez-vous important et ils ne sont pas prêts à le perdre. Ce sont eux qui sont les mieux placés à pouvoir le commercialiser car ils contrôlent les aboutissants du contrat, notamment les joueurs et les dates…
G.P. : Pour en revenir à FedEx, pourrait-il rester sponsor titre de l’Open de France après 2025 ?
P.G. : Oui, bien sûr. Là ils vont tester tout cela pendant deux ans mais on verra après… C’est plutôt encourageant que ce soit une société américaine qui le fasse. Car dans le cadre de mettre en place un tournoi international, avec les Américains, c’est bien d’avoir FedEx comme potentiel partenaire.
Le golf ne peut pas être une affaire d’impérialisme américain. Tout ne peut pas se passer qu’aux Etats-Unis.
Pascal Grizot
G.P. : Vous avez évoqué le LIV Golf. Parviendront-ils selon vous à un accord avec le PGA Tour et le DP World Tour ?
P.G. : Au lieu de parler d’argent, je pense qu’ils feraient mieux de parler de produit. Aujourd’hui, malheureusement, le produit n’est pas bon. D’un côté, on a des joueurs qui évoluent sur le LIV et de l’autre on a des joueurs sur le PGA Tour. Ce que l’on voit en ce moment, c’est que les audiences du PGA Tour baissent chaque semaine. Et le LIV ne compense pas cette baisse d’audience. Tout le monde peut perdre dans cette histoire. Les gens du LIV ont dépensé déjà beaucoup d’argent pour un produit complémentaire mais pas ultime selon moi. Cela peut être un bon produit mais pour moi le produit incontournable, c’est un tournoi sur quatre tours avec les meilleurs joueurs du monde qui s’opposent les uns et les autres. Et ça, pour l’instant, ça n’existe que sur les quatre tournois Majeurs. Les fans de golf consommaient du golf tous les week-ends. Ce n’est plus le cas aujourd’hui.
G.P. : Que préconisez-vous alors ?
P.G. : Ce qu’il faudrait, c’est de savoir ce que l’on fait de tout cet argent. De tous ces milliards. Généralement, dans les affaires, on a d’abord une bonne idée et ensuite on trouve l’argent pour. On n’amène pas l’argent en se disant : « Tiens, on va voir ce qu’on va faire avec ! » Quand je vois les sommes dépensées sur le LIV, aux alentours de six milliards, ce qui est colossal, ça n’a pas permis d’amener une image qui soit bien meilleure pour le golf. Au contraire, ceux qui nous critiquent en disant qu’on est un sport où il y a trop d’argent, ça leur donne raison en ce moment…
G.P. : La solution, quelle serait-elle par conséquent ?
P.G. : Pour moi, c’est d’avoir les quatre tournois Majeurs avec un PGA Championship à vocation internationale, c’est-à-dire un événement qui devrait voyager en dehors des Etats-Unis une année sur deux. Pour justement récompenser les autres PGA dans le reste du monde et qui ont besoin, à l’image de la Ryder Cup, des grands champions qui viennent chez eux et ainsi développer dans leur pays l’intérêt du golf. Il faudrait au-delà de ça qu’il y ait au minimum cinq International Series, qui seraient des rotations en visitant à tour de rôle des pays différents.
Le golf ne peut pas être une affaire d’impérialisme américain. Tout ne peut pas se passer qu’aux Etats-Unis. Ils ont trois des quatre Majeurs en ce moment sur leur sol et 100 % des plus gros tournois. Il faut que ça change. Cela ne peut pas rester comme ça. L’intérêt du golf, ça ne peut pas être celui du PGA Tour. Cela doit être d’abord un bon produit qui fait que le golf continue à se développer dans le monde…
Je l’ai dit à Yasir Al-Rumayyan, pour lequel j’ai beaucoup de respect. Il y a eu la disruption, c’est maintenant le temps de la construction. Il faut désormais réfléchir à une vraie construction du golf mondial.
Pascal Grizot
G.P. : Le LIV Golf va-t-il continuer à exister selon vous ?
P.G. : Oui. Ils ont dépensé beaucoup d’argent et ça ne changera pas. Je ne les vois pas du tout arrêter. Je les vois au contraire continuer à vivre à côté d’un PGA Tour, d’un DP World Tour, d’un Asian Tour… Et c’est parfaitement possible. Il faut donner des points (mondiaux) aux tournois du LIV. Je ne vois pas pourquoi quand Tiger Woods fait un tournoi aux Bahamas avec vingt joueurs, celui-ci obtient des points mondiaux. Et quand on a des joueurs comme Jon Rahm, Brooks Koepka, Dustin Johnson, Cameron Smith, on ne peut pas avoir des points. Alors peut-être qu’ils ne devraient pas avoir le même nombre de points parce qu’ils jouent sur trois tours mais c’est normal d’avoir, en fonction de la qualité du champ proposé, des points pour ces tournois du LIV. Si on leur donne des points, il faut en revanche que les joueurs du LIV soient obligés d’aller jouer les International Series. Je ne vois pas comment on va pouvoir vendre des tournois à 20 ou 25 millions de dollars si on n’a pas les meilleurs joueurs.
Aujourd’hui, les Signature Events, ça ne marche pas. Je ne vois pas qui est capable d’aller payer pour ne pas avoir les meilleurs joueurs du monde. Je ne comprends pas pourquoi personne n’est capable de se mettre autour d’une table… Pourquoi le Royal & Ancient, pourquoi l’USGA ne participent pas à ces discussions ? Eux aussi, ils ont des tournois professionnels. Pourquoi toutes les instances mondiales ne participent pas à cette discussion dans l’intérêt du jeu de golf ? Aujourd’hui, aucune voix européenne n’est présente autour de la table. Le golf aux Etats-Unis, c’est 25 millions de golfeurs, je suis d’accord. Mais il en reste encore 75 millions dans le monde. Et eux, pourquoi ils n’ont pas le droit à la parole ? Malheureusement, dans notre sport, il n’y a pas de leadership. Dans n’importe quel sport, il y a un patron. Dans le golf, il n’y en a pas. On en a cinq ou six… Je l’ai dit à Yasir Al-Rumayyan, pour lequel j’ai beaucoup de respect. Il y a eu la disruption, c’est maintenant le temps de la construction. Il faut désormais réfléchir à une vraie construction du golf mondial.
G.P. : Un Tour mondial comme le préconise Greg Norman depuis plusieurs années, c’est la solution pour atténuer les tensions ?
P.G. : A terme, je pense qu’ils vont y arriver. Mais en ce moment, comme je viens de le dire, on est plus dans la disruption de valeur que dans la construction. Il y a de très gros sponsors historiques qui se désengagent du golf. Notamment sur le PGA Tour. Et il y en a d’autres qui pourraient venir mais qui ne viennent pas. Moi, aujourd’hui, je ne vais pas perdre ma crédibilité auprès d’amis en leur vendant quelque chose qui ne tiendra pas ses promesses. Les partenaires sur les tournois Majeurs ne partiront jamais car c’est le seul endroit où les meilleurs joueurs du monde peuvent s’affronter. Si demain, on créé des International Series, là, ça pourrait m’intéresser de faire venir des partenaires importants, pourquoi pas une grande marque de luxe française, car ce serait une nouvelle occasion pour les meilleurs joueurs de croiser le fer les uns les autres.