
Considéré par Golf Planète comme le plus beau parcours du Maroc, Mazagan, situé à El Jadida, à 100 kilomètres de Casablanca, est aussi réputé pour son entretien d’exception. Très respectueux de l’environnement, le golf dessiné par la légende Gary Player continue encore d’élever ses standards de préparation et d’infrastructures. La greenkeeper en chef des lieux, Hajar Benlouali, nous livre les secrets des greens et des fairways de Mazagan, au top tout au long de l’année (lire aussi son interview en bas de l’article).
De Mazagan, on vous a déjà beaucoup dit. De son hôtel golf resort qui regorge de plaisirs, de son parcours d’exception, que l’on classe en tête de nos préférés au Maroc, alors que la concurrence est forte.
Sous la direction du Français Jacques Claudel, une pointure dans l’industrie hôtelière internationale, le Mazagan Beach & Golf Resort, né en 2009, poursuit encore sa croissance.
Tout comme le parcours tracé par le légendaire Gary Player, un 18 trous bichonné par les équipes du directeur du golf Marwann Chamsseddine, un ex champion marocain au joli palmarès. Il s’appuie sur une équipe de greenkeepers chevronnés, dirigés par une femme, Hajar Benlouali. Preuve aussi du modernisme des lieux alors que le golf et plus particulièrement le greekeeping est historiquement un domaine réservé aux hommes.
« Je suis très exigeant sur l’entretien du parcours, je suis même méticuleux. J’en connais chaque recoin et je repère vite ce qui peut sembler être un ‘défaut’ anodin », reconnaît d’emblée Marwann Chamsseddine, qui apprécie toujours les compliments mérités que l’on peut adresser à la préparation de tout premier plan de Mazagan et qui écoute avec attention les remarques des golfeurs habitués des lieux.
Une station d’épuration pour un arrosage écologique et responsable
« Pionnier dans le traitement de l’eau » comme aime à le rappeler Jacques Claudel, le Mazagan Beach & Golf Resort, équipé d’une station d’épuration ultra moderne (STEP), recycle toutes les eaux, que ce soit celles des pluies organique, pluviales ou des eaux usées de l’hôtel (cuisines, chambres, villas). Les jardins du resort, le terrain de football et le golf sont donc arrosés en permanence avec ce label écologique.
L’été, au plus fort de la fréquentation, c’est près de 500m3 d’eaux usées qui sont traités par jour. Hajar Benlouali explique les bienfaits de ce système pour le golf qui est toujours vert tout au long de l’année.
« Arroser le parcours avec les eaux usées traitées au sein du Resort nous permet de sauvegarder les eaux naturelles mais aussi de tirer profit des éléments nutritifs contenus dans cette eau. Cette “fertilisation gratuite” est l’un de nos secrets pour maintenir un parcours verdoyant toute l’année, en plus, bien sûr, de la grande résistance du Paspalum Platinum. Cette variété de gazon est tout simplement indestructible : elle peut même tolérer un arrosage à l’eau de mer et résiste aux tontes très basses. D’ailleurs, nous maintenons généralement une hauteur de coupe autour de 1,8 à 2 millimètres. »

L’arrosage à Mazagan est parfaitement éco responsable grâce au recyclage des eaux usées et à une station météorologique. ©Philippe Millereau
Le résultat est bluffant : les départs, les fairways et les greens de Mazagan sont immaculés, les bunkers de sable de dunes sont compacts et consistants. Les larges greens vallonnés, véritables pièces maîtresses de ce parcours links, font la fierté de l’équipe d’Hajar Benlouali.
Leur fermeté et leur vitesse sont à la hauteur de la réputation des lieux. « Au stimpmeter, nous oscillons entre 9,5 et 10,5 pour des conditions de jeu normales. Mais en compétitions, nous sommes entre 11 et 12, voire même plus. Lors de la dernière compétition professionnelle par exemple, on a atteint 13. » Des vitesses de parcours de championnat plutôt rares pour un links…
Des greens bluffants de qualité tout au long de l’année
De plus en plus sollicité pour accueillir des grandes compétitions, comme les championnats arabes professionnel disputés en janvier de cette année, Mazagan peut se targuer de maintenir un excellent niveau d’entretien toute l’année.

Quelle que soit la période de l’année, les greens de Mazagan sont roulants, fermes, soyeux, piégeux aussi…
Pour agrémenter le tout, la destination possède aussi l’un des plus beaux practices du monde. S’échauffer sur l’herbe du driving range face au soleil levant au petit matin est un bonheur indescriptible.
Quant à la zone de petit jeu qui a été agrandie, elle offre des vues panoramiques sur l’océan qui vous feront oublier momentanément vos difficultés au chipping.
Apprivoiser le grain du fameux paspalum platinium réclame de passer beaucoup de temps autour des greens. Mais soyez-en convaincus, on ne se laisse jamais de Mazagan. Ni de son parcours, ni même de sa zone d’entraînement…
Interview avec la greenkeeper en chef, Hajar Benlouali : “Nous surveillons tous les jours le parcours avec minutie”

©Mazagan
GOLF PLANETE : Depuis quand êtes-vous la super intendante du parcours de Mazagan et comment êtes-vous arrivées à ce poste ?
Hajar Benlouali : Je suis arrivée en poste en juillet 2024. Je suis ingénieure agronome. J’ai toujours été passionnée par la nature et la science. Après l’obtention du diplôme d’ingénieure en 2013, j’ai eu le coup de foudre pour le milieu golfique. Cela réunissait tout ce qui me passionnait, en plus d’être un métier très demandé et avec très peu de ‘ressources’ marocaines. J’ai donc décidé de me positionner sur cette profession, mais à l’époque, en 2013, il n’y avait pas de formation de greenkeeping dans notre pays. J’ai donc choisi de passer par la recherche appliquée et de faire un doctorat sur l’arrosage des parcours de golf avec les eaux usées traitées, en menant mes expérimentations dans un golf à Agadir.
Après quelques ‘consultings’ auprès de golfs marocains, j’ai intégré la Fédération Royale Marocaine de Golf (FRMG) en tant que ‘responsable des commissions Formation et Eau & Environnement’. Cette expérience m’a offert une vision globale du golf marocain, notamment à travers les nombreuses initiatives portées par son Président, Son Altesse Royale le Prince Moulay Rachid.
Par la suite, il y a eu cette belle opportunité d’intégrer l’équipe du Mazagan Beach & Golf Resort en tant que Head Greenkeeper. En à peine huit mois, l’expérience a déjà été assez riche. Nous avons accueilli plus de 7 compétitions, dont des événements internationaux comme la finale du Trophée Canal+ ainsi que la FCUP en novembre, ou la compétition Mastercard en septembre 2024, où nous avons eu l’honneur d’accueillir Colin Montgomerie. Il y a évidemment une exigence spécifique sur la préparation du parcours pour ces compétitions. Mais l’exigence est de toute façon élevée toute l’année.
GP : De quels moyens disposez-vous pour entretenir le parcours ?
H.B. : Quand je suis arrivée, le parcours était déjà dans un excellent état. Je dirai que le point fort de notre parcours est avant tout l’équipe. Nous sommes une équipe de 20 personnes dont 13 jardiniers, 1 chef mécanicien avec 3 aides, un fontainier, mon assistant greenkeeper et moi-même.
Notre équipe est une équipe aguerrie constituée d’hommes engagés et ayant un grand savoir-faire (certains sont là depuis l’ouverture en 2009). Ils ont été formés avant mon arrivée et continuent à l’être chaque mois. Je dirais qu’ils ne se contentent pas d’être des exécutants, mais qu’ils sont de véritables « artisans du gazon ». Ils sont toujours dans le détail et la précision.
Il faut dire aussi que l’humain est au cœur des priorités de la gestion du Resort et cela se ressent dans la qualité du travail produit. En plus, nous avons les moyens de travailler. Par exemple, toute la station de pompage a été récemment rénovée avec des équipements de pointe. Le parc mécanique est aussi renouvelé graduellement chaque année.
GP : Quelles difficultés rencontrez-vous tout au long de l’année et des saisons pour conserver un entretien de premier plan sur ce links ?
H.B. : Le parcours de Mazagan Beach & Golf Resort offre un paysage époustouflant sur l’océan Atlantique. Mais en face de cette beauté, il y a évidemment des conditions climatiques qui peuvent être difficiles à gérer. L’humidité est le facteur le plus compliqué à appréhender. Certains matins, le brouillard est phénoménal, ce qui présente un risque élevé de maladies cryptogamiques. Nous restons donc constamment vigilants et à l’affût de tout changement au niveau du gazon. Je dirais que l’excellence de notre parcours réside dans une surveillance continue.
D’ailleurs, avec Marwann (Chamsseddine), nous passons beaucoup de temps sur le parcours. Nos échanges sont constants, mêlant observations du terrain et ressenti des joueurs, ce qui nous permet d’ajuster nos actions de manière efficace et d’offrir le meilleur à nos clients. Ils viennent des quatre coins du monde, ils ont souvent parcouru de longues distances pour jouer sur notre parcours. Parfois, ils ne jouent qu’un seule fois. Nous nous sentons donc pleinement responsables de leur offrir une expérience d’exception, quelle que soit la période de l’année.
GP : L’écologie et la préservation de l’environnement sont au cœur des priorités du resort et du parcours donc. Cet élément vous tient-il particulièrement à cœur dans votre mission ?
H.B. : Complètement. Mazagan est certifié Earthcheck depuis 2019. Actuellement, on est est sur le niveau Silver, ce qui témoigne de l’engagement du Resort envers la durabilité.
Pour ne citer qu’un exemple, le Resort a lancé en 2024 sa propre station pour recycler et valoriser ses déchets organiques et alimentaires. Cette station s’ajoute à celle dédiée au traitement des eaux usées, en place depuis 2009, et qui couvre l’ensemble de nos besoins en eau pour l’arrosage.
Concernant le golf, le développement durable est au cœur de notre mission. Le parcours du Mazagan se trouve au centre d’une forêt qui regorge d’une biodiversité animale et végétale impressionnante. Sur le terrain, on croise des aigles, des hirondelles, des coccinelles, et j’avoue me sentir personnellement responsable de leur préserver cet écosystème.
C’est pourquoi j’opte pour des traitements biologiques et une stratégie préventive concernant les maladies. Au lieu de guérir la maladie, j’essaie de l’éviter en boostant la santé du gazon. Cela passe d’abord par des pratiques culturales régulières (aération, sablage, roulage, etc.) et ensuite par de la fertilisation adaptée où je préconise surtout des produits biologiques tels que les biostimulants à base d’algues. Enfin, un point important c’est l’arrosage bien sûr. Une station météorologique et une sonde d’humidité nous permettent de connaître le besoin exact en eau de chaque zone, chaque recoin du parcours. Il nous arrive de faire des arrosages d’appoint qui se limitent aux zones, qui selon nos mesures, ont besoin d’arrosage supplémentaire. Nous sommes vraiment dans la précision.
Évidemment l’un des points forts en matière d’environnement, c’est l’arrosage du parcours avec des eaux recyclées. C’est une ressource eco-friendly et durable. Nous ne risquerons jamais d’être à court d’eaux usées.
Il faut aussi ajouter que le Paspalum platinium est un gazon de saison chaude. Il entre en dormance pendant la période hivernale. Actuellement, on profite donc de cette période de baisse de croissance pour peaufiner les abords du parcours, travailler les bunkers et avancer sur le système d’arrosage.
© Photos Philippe Millereau/KMSP