À l’amorce de 2021, nous voilà encore brinquebalants face aux drames imposés par la Covid 19, mais « Bonne Année » répétons-nous à l’envi, en se donnant le mal de vouloir y croire. L’optimisme en prend un sacré coup tant personne, parmi les autorités les plus autorisées à prédire tout et son contraire dans la foulée, ne sait quand le virus finira de foutre le bordel aux quatre coins du monde.
Ramenée au golf, l’ambiance n’est évidemment pas des plus joyeuses. Faisons tout de même comme si, tant la saison annoncée par votre site préféré pourrait être grandiose si les vaccins signent vite l’ace permettant aux fans de retrouver leurs « stars » plus souvent qu’hier.
Les tournois n’ont jamais été aussi nombreux que dans les calendriers de 2021. Parmi les rendez-vous reportés ou annulés l’année dernière, outre les majeurs toujours très attendus, les 18 trous olympiques de Kasumigasek (Tokyo), l’Europe féminine à la défense de sa Solheim Cup à Inverness (Ohio) ou la Ryder Cup en tête de gondole. Aborder le sujet, c’est se plonger dans d’ébouriffantes brèves de comptoir autour du choix de Whistling Straits comme théâtre de sa 43e édition (24/26 septembre).
Paumé de chez paumé
Qu’on se le dise, il y aura un avant et un après cette Ryder Cup, ce qui reste plus agréable à vivre qu’un avant et un après Covid… Nous serons à Kohler près de Sheboygan, bourg reculé du Wisconsin sur les rives du lac Michigan, à quelque 90 kilomètres de Milwaukee, brave ville que nous regrettons tous de ne pas connaître mieux… C’est paumé de chez paumé, un coin qui n’a jamais figuré sur l’itinéraire d’un golf-trotter décent jusqu’en 1998 quand Pete Dye, architecte génial, y a planté un parcours incontournable amenant les plus fondus à explorer ce territoire du Middle West américain.
Walter J. Kohler, ancien gouverneur du Wisconsin en 1928, a donné son nom au village accueillant « The American Club », bel hôtel né en 1918 qui a vu passer tout ce que les Etats-Unis ont compté de gloires. Oublié avec le temps, l’adresse a retrouvé son lustre sous l’impulsion de Herbert V. Kohler, héritier de la dynastie, avec quatre beaux parcours signés par Dye. En tenue de tournoi, ils sont pénalisants. Mais, pour les clients de l’American Club et « The Inn on Woodlake », et les golfeurs de passage (pensez à prévoir une réservation deux semaines en amont. Coûts : green fee, caddie, forecaddie, pourboire -> $600), ils se montrent respectueux des qualités et des défauts de chacun. La partie devient un vrai plaisir sans trop de souffrance, mots bien lisses que les 24 équipiers de la Ryder Cup préfèreraient coller au beau monstre Whistling Straits à vingt minutes de là.
Pour le plaisir de souffrir
Comment vous dire… Venus en touristes jouer par temps calme et drapeaux câlins, le “Straits” est une Tour Eiffel grimpée en ascenseur. En tournoi, c’est monter à pied les 700 marches jusqu’à son 2ème étage. Une performance haletante qui fait de ses 7123 mètres l’un des parcours les plus extraordinaires au monde. Les grips de Vijay Singh (2004), Martin Kaymer (2010), Jason Day (2015), vainqueurs ici d’un PGA Championship, s’en souviennent encore.
Des bosses et des trous
Le choix de Pete Dye s’était porté sur une rive plutôt plate du lac Michigan, ancienne base militaire, mais pour la faire littéralement exploser. C’est un peu la plaine cabossée de Verdun après la grande guerre comme un bout détaché de Mars, l’autre golf-planète… Des trous, des bosses partout, du sable juste haché par les bandes de fairways tortueux débouchant sur des bunkers dont on ne sait pas s’ils en sont vraiment et des greens où la balle ne tient qu’à un fil dans la brise du grand lac mitoyen. Le tout est parsemé d’une végétation grasse avec, ici ou là, quelques plantations d’arbres et des déclivités permettant, aux points les plus hauts, de s’offrir une carte postale sur les couchers de soleil du Michigan. “Je dirai, avec un brin de modestie, que je n’ai rien vu de pareil dans ma vie. Nulle part”. Disparu en janvier 2020, Pete Dye ne plaisantait pas. Ses 7124 mètres viennent d’un autre monde, dans la lignée de Kiawah Island et de TPC at Sawgrass (et son fameux No 17) en pire.
Le golfeur est une bête bien curieuse
Pendant le tournoi, plus de 35 000 personnes parcourront ce territoire de haut en bas chaque jour. L’infirmerie aura ainsi sa dose de foulures et d’entorses, le seul endroit à peu près fréquentable pour la marche étant le fairway. Reporté en match play, ça signifiera des tas de surprises, la chance se mêlant aux scores. Pour choisir l’équipe vainqueur, la crème du golf mondial, le “Straits” fera dans l’injuste prix.
Reste à savoir ce que vous donneriez sur ce territoire pour masos, un peu comme Les Bordes au centuple. On y va. On s’y noie, mais on en sort heureux. Le golfeur est une bête bien curieuse…