Le golf est un sport – jeu, passe-temps, loisir – riche de réjouissances et de déceptions, de coups de coeur et de frustrations. Quand vous les vivez, à votre niveau de joueur de week-end, le métabolisme est déjà mis à rude épreuve, une interrogation pour ceux, les plus nombreux, qui savent tout sans n’avoir jamais rien demandé.
Imaginez alors le stress que peut endurer le pro, membre d’un grand tour, qui a donc fait du golf son métier, à quelque niveau qu’il se situe avec de grands noms pour disputer des millions semaine après semaine. Ou cet autre plus neutre qui rejoint des professeurs échappés des leçons routinières pour vivre, juste une journée, les plaisirs d’un pro-am doté de quelques sous et jouer en compagnie de swings à la fois amicaux et peu classiques.
Court circuit
Alors, insidieusement, leur jeu peut se désagréger, le tempérament prend feu, met en bouillie les efforts précédents et les excellents scores qui en ont découlé à Pebble Beach, au Grand Avignon ou à Bonmont.
C’est ainsi que Woods avait pu se refaire une santé en reprenant sept coups sur autant de trous pour sucrer la victoire déjà dans le sac d’un Matt Gogel décomposé à Pebble Beach, ou comme le vainqueur du récent Senior US Open, Jim Furyk, plus tard au Doral devant un Franklin Langham, lui déconfit par la peur de vaincre.
Rarement répétitif
Au golf, on trépigne intérieurement quand la balle part dans un “clingggg” idéal, déroulant le bel arc imaginé au coup d’essai, atterrissant au coeur de la cible visualisée.
Le chef d’oeuvre est difficile à réaliser deux coups de suite, et peut-être cinq fois au mieux au cours d’une partie où tout roule. Frustrant!
Pire encore quand le coup est manqué. On intériorise, voire extériorise alors sa rage un peu ou beaucoup, humilié, anéanti, dévasté par l’affront de voir cette balle, ces balles, prendre la mauvaise tangente.
C’est sans doute la même chose au foot, vous diront les trois jeunes lions qui ont flingué la victoire anglaise à l’Euro, ou au tennis où on a mal pour les raquettes. Mais l’inaction y est de trop courte durée pour permettre aux neurones de gamberger.
Proche de l’enfer
Dans le chaudron d’un majeur, ou da la médaille dominicale, le défi que propose le golf est d’abord de garder son sang-froid quand le swing se met, sans raison, aux abonnés absents.
C’est si délicat un swing. C’est fait de mille et un paramètres, muscles, nerfs, angles, vitesse et précision.
Alors fini le rythme. Adieu la synchronisation. Bonjour les noms d’oiseau, ou (pire) les clubs qui volent dans tous les sens, comme les balles. L’exemple est quotidien, les partenaires d’un jour voyant aussi leur golf secoué par ces gesticulations sans n’avoir rien demandé.
Compresser les désillusions
Quand le niveau de frustration atteint cet état, il faut le savoir, il accentue la faiblesse musculaire et crypte la prise de décision, engendrant éventuellement une succession de trous manqués que le joueur ou la joueuse ne sait pas expliquer. Le “c’est le golf” n’est pas suffisant, tout juste un plâtre sur une jambe de bois.
Avec l’appui de psychologues, la clé du rébus est de limiter, de compresser cette sorte de désillusion. Et jouer de la substitution, à l’instar de trucs éprouvés proposés aux fumeurs. Exemples, plutôt que jeter un club ou sa chaussure comme le jeune Sergio Garcia… pensez à lentement manger une banane ou prendre le temps de réparer un divot.
À chaque divot aplani, un petit bout de calme et de sang-froid retrouvé. À terme, on se fait du bien (comme aux greens soit dit en passant) et on devient le joueur avec qui les autres ont envie de partir dans une ambiance plus Trevino et Jiménez que Koepka et DeChambeau.
Compenser
Proches de notre affection, deux grands caractères du golf avaient ainsi trouvé leur truc simple pour s’opposer à l’adversité.
Coloré de la tête aux footjoys, Payne Stewart mastiquait alors encore plus vigoureusement un éternel chewing-gum quand ça tournait mal et l’ami Richard Wax, Waxie pour toujours, faisait de sa jovialité un sacré redresseur des torts venant affecter son swing.
Oui… La jouer « cool-raoul », ça paye. Pensez-y.
PPH
©PHOTO Mohd RASFAN / AFP