Le Trophée Lancôme fut, à coup sûr, une des plus grandes manifestations de golf organisées en France. Alors qu’on célèbre aujourd’hui les 50 ans de sa création et malgré sa disparition après l’édition de 2003 remportée par Retief Goosen en présence de Nicolas Colsaerts (photo), le Trophée Lancôme est toujours dans la tête des fans de golf.
Pour en parler, Golf Planète a retrouvé Robert Salmon en Suisse, celui qui a été à l’origine de ce grand tournoi international remporté par les plus grands champions.
Robert Salmon était alors à triple titre une des grandes figures de L’Oréal. Il fut l’architecte de l’orientation luxe que le groupe n’avait pas dans son ADN, il fût aussi à la pointe de la conquête des marchés américain, asiatique et européen de l’Est, et enfin, il a été le premier à mettre des marques cosmétiques et parfum dans les duty free, alors qu’il y avait jusque-là une résistance très forte de la part des patrons de ces marchés.
Pendant ses 37 années chez L’Oréal, l’homme aux 300 000 kms par an, fût entre autres vice-président chargé de la prospective stratégique et le DG d’une vingtaine de marques de 1969 à 1990.
Il est par ailleurs l’auteur d’une dizaine d’ouvrages, notamment de prospective, citons Tous les chemins mènent à l’homme (Interéditions, 1995, prix du Livre d’entreprise), Sauver demain (Sefi, 2015), préfacé par Nicolas Hulot, De l’Oréal à Lhassa, itinéraire d’un iconoclaste (Le Passeur, 2015), son autobiographie de grande qualité qui dévoile un homme étonnant toujours en conquête, du monde comme du soi…
Il s’est confié pour nous à Hervé-Olivier Colombet et Philippe Soleillant afin de rappeler les 33 ans de cette aventure exceptionnelle.
Quelle est l’origine du parrainage de L’Oréal pour le Trophée qui se jouait alors à Saint-Nom-La-Bretèche ?
En 1970, lors de la première (et dernière) édition du Trophée des champions, Gaëtan Mourgue d’Algue, figure du golf de Saint-Nom-La-Bretèche, et Dominique Motte, son président, invitent Pierre Menet, président de Lancôme et… golfeur, à faire une partie avec Arnold Palmer. Ce dernier est par ailleurs ami d’université de… Mark McCormack, le célèbre agent de sportifs professionnels, en particulier dans le golf et le tennis, qui organisait ce trophée.
Au contact d’Arnold Palmer, Pierre Menet s’engage à créer une ligne de parfum pour hommes qui porterait le nom du champion, moyennant évidemment finance. Il m’en informe, je suis alors le DG de Lancôme. Je suis très réservé sur le retour sur investissement car à l’époque la marque n’avait aucune implantation en Amérique, qu’Arnold Palmer n’était connu en France que d’un tout petit public, le golf étant peu pratiqué, et de surcroît les lignes pour hommes ne marchaient pas en Europe. L’échec d’une telle ligne était certain.
D’où l’idée pour honorer quand même la promesse financière, d’apposer pour 1971 la marque Lancôme au trophée golfique…
Eh oui, car il nous fallait honorer la promesse signée de Pierre Menet. Mais on pouvait imaginer autre chose Et nous allons alors métamorphoser la dotation allouée au joueur en lui demandant d’assurer sa présence durant cinq ans au trophée qu’on baptiserait Lancôme (il s’appelait en 1970 Trophée des champions). Arnold Palmer ne gagnera d’ailleurs le Trophée qu’une fois… en 1971. L’idée de mettre un nom de marque sur un trophée n’était pas légalement acquis mais la relative confidentialité de ce sport en France à l’époque l’a permis.
De fait, la participation assurée de Palmer a attiré les meilleurs golfeurs du monde et a donné un lustre à ce qui était à l’origine une « fantaisie particulière ». Cela a permis l’organisation d’un grand tournoi international pendant plus de trente ans… Le Trophée Lancôme étant devenu un des trois plus grands tournois de golf du monde, après ceux d’Augusta aux États-Unis, et de Picadilly en Angleterre.
Mais il y aura une fin …
Nous avions certes sorti, en 1982, une ligne Cologne au nom de Trophée Lancôme pour hommes complétée par une gamme d’accessoires. Bien que largement diffusée elle n’a pas connu le succès escompté. Il aurait fallu créer une ligne de vêtements et de matériel de golf, mais ce n’était pas le métier du Groupe…
Le financement du Trophée coûtant de plus de plus en plus cher au vu du nombre de participants, la dotation de Lancôme s’était multipliée et le retour sur investissement n’était vraiment pas là.
Aussi en septembre 2003, Lindsay Owen-Jones, alors PDG de L’Oréal avant de devenir président (de 2006 à 2011), décida donc en raison de son coût prohibitif pour le Groupe d’arrêter le parrainage du Trophée. Il est vrai aussi que, le 16 mai 2003, Mark McCormack était décédé. Les attentats du 11 Septembre auront également une part importante dans l’histoire du début de la fin du Trophée Lancôme car le célèbre champion américain Tiger Woods, alors au firmament de sa gloire, était inscrit à la 32ème édition, d’autant qu’il était sous contrat avec le Groupe IMG et qu’il s’apprêtait donc à venir à Paris. En cette année maudite Tiger ne viendra pas. Il annulera naturellement sa participation, en mémoire de ses innombrables compatriotes décédés dans les tours jumelles de New-York. L’histoire retiendra son absence mais aussi celle du sponsor-titre de l’événement, qui marquera le début d’une rupture inéluctable entre IMG (Agent du Champion américain et propriétaire du « Trophée Lancôme ») et son client le Groupe l’Oréal (propriétaire de la marque des parfums Lancôme).
Photo by PIERRE VERDY / AFP, DR
Les souvenirs du Trophée Lancôme by Alexis Orloff
Seve Ballesteros
Retief Goosen
Sergio Garcia
Alex Cejka et Inès Sastre
Miguel Angel Jimenez
Merci Alexis !