Il y a 24 ans, Tiger Woods s’imposait en play-off dans le PGA Championship à Valhalla, une victoire en forme de point d’exclamation d’une saison 2000 extraordinaire où il a aussi triomphé à l’US Open et à l’Open britannique avec une marge combinée de 23 coups d’avance. Sacré « Champion des champions » par le journal l’Equipe, le Tigre était sur le toit du monde. Retour sur un exploit marqué par une image iconique, celle du Tigre courant vers sa balle avant qu’elle ne rentre pour birdie en play-off. En 2024, il revient un peu clopin-clopant dans le Kentucky…
Qui se souvient de Bob May ? Ce joueur américain au pedigree modeste a bien failli entrer dans la légende du golf. Il y figure d’une certaine façon, car même s’il n’a pas gagné le PGA Championship en 2000, il est celui qui a fait vaciller le roi. Il est peut-être aussi celui qui a offert la plus grande résistance en Majeur à celui qui en a remportés 15. La résistance héroïque de May est d’autant plus méritante qu’en 2000, Tiger Woods a joué le meilleur golf de sa vie. Il a accompli la meilleure saison de sa carrière. Il a (presque) tout gagné, tout écrasé.
Quand il débarque en août dans la cité chaude et humide de Louisville dans le Kentucky pour défier le parcours de Valhalla lors du dernier Majeur de la saison, Woods compte déjà six titres dans l’année. Il a écrasé l’US Open à Pebble Beach, s’imposant avec 15 coups d’avance (oui, 15, vous avez bien lu). Il a dominé l’Open britannique à St Andrews avec un matelas de 8 coups. Il a gagné à quatre autres reprises sur le PGA Tour. Lors de cette seule année 2000 historique, Tiger va battre 27 records du PGA Tour, terminer 14 fois dans les trois premiers sur les 20 tournois qu’il jouera sur le circuit américain.
Le casse de l’an 2000
Sur X, un journaliste de Golf Digest s’est amusé à calculer son « prize money » avec les montants d’alors et d’aujourd’hui. Sur cette saison 2000, Tiger avait cumulé plus de 10 millions de dollars. Cela lui aurait rapporté aujourd’hui, avec l’équivalence des tournois, plus de 92 millions de gains…
How much would Tiger’s 2000 season have earned him in 2024 money?
Of course, I calculated it 💰 pic.twitter.com/jgzeG25aoK
— Jamie Kennedy (@jamierkennedy) April 17, 2024
Bref, à Valhalla, Tiger Woods, tenant du titre, déjà quatre fois sacré en Grand Chelem, est le grandissime favori pour conquérir le volumineux trophée Wanamaker qui récompense le vainqueur du PGA Championship. Mais un joueur va lui donner du fil à retordre, et pas qu’un peu. Bob May, 31 ans, aucune victoire sur le PGA Tour (mais une sur le circuit européen, le British Masters en 1999), enquille des tonnes de birdies le dimanche et souffle la tête du tournoi à Woods, pourtant seul aux commandes après les trois premiers tours.
Malmené, le n°1 mondial doit jouer les douze derniers trous en -7 et rentrer un birdie sur le 72e trou (un putt gauche-droite de 1,50 m) pour partir dans un play-off de trois trous face au « journeyman » qui venait de lui planter quatre mètres pour birdie, avec une double pente, sous son nez. Le duel entre le deux hommes peut continuer.
Ce play-off fait partie de la légende du golf. Dès le premier trou, le n°16 du parcours, le spectacle est immense. Bob May sauve le par en réussissant un chip invraisemblable, donné, de plus de 30 mètres. Dans la foulée, Tiger Woods réussit un birdie avec un putt de 8 mètres.
Le doigt pointé vers la balle, une image d’Epinal
L’image du Tigre marchant rapidement en pointant sa balle du doigt avant même qu’elle ne rentre dans le trou est devenue iconique. C’est celle qu’avait choisie le journal l’Equipe pour faire sa Une avec le « Champion des Champions » de cette année 2000. Woods est d’ailleurs le seul golfeur de l’histoire à avoir eu cet honneur dans le plus grand quotidien (et aujourd’hui unique) de sport en France.
Ce fut un immense moment de golf, peut-être aussi fort que le chip in de Woods au Masters en 2005.
©L’Equipe
La suite du play-off sera, elle aussi, assez folle. Les deux hommes sauvent le par de façon magistrale après avoir égaré leurs mises en jeu au 17. Au 18, sur un par 5, Woods expédie son drive vers les tentes d’hospitalité. Après quelques secondes d’incertitude, la balle reviendra miraculeusement dans le champ des caméras, roulant sur le « car path ».
Aujourd’hui encore, on se demande comment cette balle a mis autant de temps avant de réapparaître en jeu. L’aide d’un spectateur ? Le mystère reste entier.
Le mystère du trou 18
Tiger réussira à sauver le par d’une épatante sortie de bunker, May manquera d’un souffle de prolonger la mort subite avec un putt longue distance qui frôlera le trou…
Tiger Woods revient donc 24 ans plus tard sur les terres non pas de l’un de ses plus grands exploits, mais peut-être de sa victoire la plus difficile en Majeur. A Valhalla, là où Rory McIlroy a aussi triomphé en 2014 – son dernier succès en Grand Chelem -, le Tigre, on le sait, aura bien du mal à célébrer un putt de la même façon qu’il l’avait fait lors du premier trou du play-off. Pour plein de raisons.
Mais avec lui, même les rêves impossibles sont permis.
©AFP PHOTO/Matt CAMPBELL