À l’origine du projet en 2001, Estelle Richard est depuis 2007 à la direction de l’Alps Tour. Celle qui a travaillé à la ffgolf par le passé se bat pour continuer à faire évoluer le circuit.
Propos recueillis par Nathan CARDET, à Cassina Rizzardi
GOLF PLANETE : Quel bilan tirez-vous de cette saison 2024 ?
Estelle RICHARD : C’est une belle saison parce que nous avons réussi à inscrire de nouveaux tournois et nous avons fait revenir une destination au calendrier avec la Tunisie. Nous avons perdu des tournois en Italie à cause du bilan de la Ryder Cup mais nous avons rebondi avec deux très beaux tournois en France (Lacanau et Longwy). Et enfin, nous avons terminé la saison dans un magnifique club au Monticello Golf Club, donc je pense que nous pouvons être content de notre saison.
G.P. : Le négatif s’est donc rapidement transformé en positif…
E.R. : D’abord, car je n’ai pas envie de faire du négativisme, ce n’est pas trop mon truc. Mais oui, nous avons tout de suite rebondi pour trouver de nouveaux tournois, et des bons tournois. Les joueurs ont beaucoup apprécié l’UGOLF de Lacanau. L’UGOLF Longwy International, c’est une fantastique découverte, on ne peut pas imaginer qu’il y ait un parcours comme cela dans cette région. Tabarka en Tunisie a été vraiment dépaysant. Surtout, ce sont des contrats pour plusieurs années. Donc, c’est encourageant pour la suite.
Nous en sommes sortis plus forts et plus structurés
G.P. : Cela laisse-t-il entrevoir de belles perspectives pour 2025 ?
E.R. : Alors évidemment, la saison 2025 est en construction. Nous allons repartir globalement sur les mêmes bases. Toutes les fédérations sont en période électorale, il faut être un petit peu patient pour que les choses se confirment. Je cherche à ajouter une date au Portugal, nous croisons les doigts pour que ça se fasse. Nous avons un projet supplémentaire en Tunisie en discussion, mais c’est toujours compliqué. Les tournois seront reconduits en Espagne, il y aura également le retour de la Gomera, dans les Iles Canaries. Nous cherchons également un lieu pour la finale car c’était un « one shot » pour cette année au Monticello Golf Club.
G.P. : Cela doit être gratifiant de voir ce circuit que vous avez initié en 2001 continuer à fonctionner, non ?
E.R. : Oui, c’est un grand plaisir parce que le moment du Covid a été un peu rude. Nous en sommes sortis plus forts et plus structurés. Nous avons tous envie de continuer et les fédérations qui sont membres du comité ont aussi envie de continuer. Bref, c’est plutôt bon signe pour les prochaines générations.
G.P. : Comment faites-vous pour continuer à améliorer le projet ?
E.R. : L’idée c’est de partager avec les joueurs, de les écouter et entendre leurs souhaits même si tout n’est pas possible à mettre en œuvre. Ils veulent, comme nous, voir les dotations évoluer et voir certains services peut-être modifiés ou remis en cause. Nous allons encore travailler avec le comité des joueurs (quatre représentants de quatre pays différents) dans les prochaines réunions pour écouter leurs suggestions. J’espère que nous allons continuer à travailler dans le bon sens.
Il faut arriver à vendre l’objectif de l’Alps Tour, c’est-à-dire aider ces jeunes talents, à les pousser, sans que cela soit totalement du mécénat.
G.P. : Les demandes des joueurs ont-elles évolué dans le temps ?
E.R. : Non, elles n’évoluent pas tant que ça. C’est plutôt la façon dont elles sont formulées qui a changé. Mais c’est lié aussi à la génération actuelle, nos joueurs ne sont que des reflets de la société dans laquelle on vit actuellement. Mais nous avons la chance d’avoir dans le comité des joueurs, des gens qui sont quand même plus posés et ça crée de vraies discussions intéressantes et constructives.
G.P. : La manière d’organiser les tournois a-t-elle changé ?
E.R. : Je trouve que c’est de plus en plus difficile. D’abord parce qu’il y a moins d’argent disponible. On sait que les pays du sud de l’Europe ne sont pas forcément au top économiquement. C’est difficile de convaincre car les retombées sont très faibles. Nous sommes sur la troisième division, les joueurs ne sont pas encore des stars, ils ne font pas vendre. Donc, il faut arriver à vendre l’objectif de l’Alps Tour, c’est-à-dire aider ces jeunes talents, à les pousser, sans que cela soit totalement du mécénat. Chaque jour, c’est un peu MacGyver, parce qu’il faut serrer les dépenses systématiquement. Nous avons très peu de marge de manœuvre. Il y a par conséquent un peu de frustration parce que nous avons envie de mieux faire certaines choses et de rendre plus de service à nos joueurs. Nous cherchons un sponsor plus global pour nous aider dans ce sens-là.
Leur progression est due à leur travail, on est vraiment pas grand chose à côté de ça
G.P. : Huit vainqueurs sur le DP World Tour cette saison sont passés par l’Alps Tour. Qu’est-ce que cela vous inspire ?
E.R. : Je suis très fière d’eux. Nous, on n’a pas fait grand chose, mais on a été là au moment où ils avaient besoin de se lancer. Ça a été vraiment la première marche de leur carrière. Leur progression est due à leur travail, nous sommes vraiment pas grand chose à côté de ça. Mais ça fait très plaisir d’avoir pu apporter une petite pierre à l’édifice. À chaque fois que je vais sur le DP World Tour ou le Challenge Tour, j’ai beaucoup de plaisir à passer un petit moment avec les anciens. Ils sont toujours à demander des nouvelles et veulent savoir où en sont les jeunes.
G.P. : Quels joueurs vous ont le plus impressionnée durant toutes ces années ?
E.R. : C’est très difficile à dire. Quand Matt Wallace a remporté six tournois dans la même saison, on a senti qu’il se passait quelque chose alors que les années d’avant, on ne le voyait pas du tout monter. Un garçon comme Victor Perez, le premier tournoi où il est arrivé, on savait qu’il n’allait pas rester longtemps sur notre circuit. Adri Arnaus aussi, il était impressionnant. J’ai toujours su également que Matthieu Pavon allait réussir. Plus récemment, Tom Vaillant, tout le monde n’a pas cru en lui, et pourtant il avait une vraie volonté d’avancer et de s’en sortir. Il y en a plein d’autres qui ont fait un an ou deux, je pense à Antoine Rozner ou d’autres. Et parfois, on se trompe aussi !
©Alps Tour Golf / Federico Capretti