Profitant de cette période inédite de confinement, 5 pros nous ont fait parvenir une tribune sur la réalité de leur métier. Avec des propositions pour bâtir un meilleur futur et assurer un développement harmonieux et dynamique du golf en France.
Golf Planète vous livre cette réflexion qui fait suite à celles que nous avions consacrées aux green-keepers, aux directeurs de golf, aux pros en confinement, aux équipementiers ou au sort des cotisations en temps de crise. Golf Planète reste au service du développement du golf pour nourrir ce débat qui se veut constructif et bienveillant.
Voici donc la tribune que nous ont adressée les cinq pros suivants :
Alexandre Halabi, entraîneur depuis 2010 Les Aisses Golf (45), Philippe Bréhier, Pro/Enseignant depuis 37 ans Golf de Loches (37), Geoffrey Marziale, 20 ans d’expérience Directeur/Pro Golf du Croisic (44), Xavier Pasanau, 30 ans d’expérience Pro PGA (82), Ugo Planchet, 10 ans d’expérience Pga (45).
Les pros de golf en France : de la réalité à un futur meilleur
Commençons par une approche de notre réalité. Il faut d’abord savoir que notre métier d’enseignant à beaucoup évolué depuis les années 1980.
Une formation pas assez adaptée aux réalités du quotidien
Si on aborde notre formation, on note ainsi que la formation BPJPES des enseignants de golf est passée, il y a quelques années, de 2 ans à 1 an. Et donc se déprécie malheureusement en qualité.
On note également, que le contenu de la formation BP est trop théorique : il faudrait plus d’intervenants de terrain (enseignants expérimentés, entraîneurs etc.) et un contenu beaucoup plus en relation avec ce que l’on va devoir faire concrètement au quotidien : apprentissage des différents courants d’enseignements, amélioration des méthodes d’analyse via des outils technologiques simples, formation sur la communication, sur le marketing, et sur les outils informatiques qu’il est essentiel de maîtriser aujourd’hui.
Quant à la formation d’État d’entraîneur (DEJPES), il nous parait incompréhensible que des jeunes enseignants sans aucune expérience puissent passer et enchainer BP et DE en 18 mois : ceci afin de préserver la valeur et la qualité du diplôme. Il faudrait au minimum 5 ans de décalage entre les 2 diplômes et justifier d’une expérience certaine d’entrainement dans son club.
Pour les formations régulières Ffg et Pga sur une ou deux journées, il apparaît que les thèmes proposés ne sont pas assez en relation avec ce que nous rencontrons au quotidien sur le terrain. Par exemple, on nous propose énormément de formations sur des outils technologiques très chers… qui ne concernent que 1% des enseignants. Nous souhaiterions des formations plus réalistes et donc plus efficaces pour répondre, au mieux, à l’attente de nos élèves (index moyen entre 20 et 30, âge moyen 60 ans).
Une des solutions ? Que la PGA achète un ou plusieurs outils technologiques par région, en proposant aux enseignants PGA d’en disposer à tour de rôle. Les effets seront aussitôt bénéfiques : amélioration de la qualité et diversité d’enseignement proposé, justification des formations, augmentation des adhérents PGA…
Chute des cours individuels et changement de méthode
On observe, de manière générale, un changement dans la façon de donner les cours individuels depuis 1980. Ces cours représentaient à l’époque 90% dans l’agenda de l’enseignant. Aujourd’hui, pour un pro salarié, c’est autour de 20% et un pro libéral entre 30% et 60%.
La méthode a également évoluée : anciens comme jeunes enseignants utilisent des outils technologiques simples mais très efficaces pour les cours (vidéo sur tablette ou mobile, logiciel d’analyse) : ces outils suffisent pour répondre à l’attente de la majorité de nos élèves dans les clubs de province.
L’avènement des cours collectifs est apparu avec les chaines commerciales de golf en 1994/95 avec comme objectifs : Former un maximum de débutants et augmenter la rentabilité des cours.
Cette formule a eu un gros succès et a modifié la répartition du travail de l’enseignant salarié mais aussi libéral. Aujourd’hui beaucoup de pros libéraux ont également des cours collectifs débutants, mais aussi de tous niveaux. La motivation et le succès de ces cours sont simples : prix attractif et lien social important. La durée des cours se situe entre 1h et 2h en fonction des structures golfiques et des professionnels.
Des limites sont apparues, en particulier au sein des grandes chaînes : cours illimités… mais limités en nombre d’élèves. Cela s’est rectifié avec le temps pour garder de la qualité d’enseignement et de formation. Mais pas encore partout.
Plusieurs solutions réalistes à mettre en place
La solution idéale serait de mettre la formation des débutants sur un an, limiter les places entre 6 et 8 personnes au maximum, inclure un accès au parcours avec prêt du matériel et dispenser un cours par semaine d’une durée comprise entre 1h30 et 3h.
Les ingrédients de la réussite d’un cours collectifs tous niveaux sont : de mettre en place une partie technique ainsi qu’une partie entraînement avec objectif (idéal 1h/1h)
L’école de golf : nous constatons un réel changement dans ce secteur au fur et à mesure des années. Un premier stade 1920/1985 où il y avait très peu d’enseignement ludique mais beaucoup de practice. Un deuxième stade 1990/2010 ou l’école de golf est devenue de plus en plus ludique grâce à l’accès aux parcours, et un 3ème stade depuis 2010 à aujourd’hui où l’on note une tendance générale à une école golf de loisirs avec peu d’investissement. Plusieurs raisons l’expliquent : culture de l’enfant multi-loisirs, enfants de parents non-golfeurs qui ne restent ou ne viennent pas au golf en dehors des cours et un championnat pour les écoles inexistant par rapport aux autres sports.
Pour améliorer ce secteur, il ressort, de manière générale, les recommandations suivantes :
- Création d’un championnat départemental par équipe jeune où tous les enfants auraient le droit de participer (équipe 1,2,3)
- Mettre un suivi par des gens qualifiés sur les écoles de manière régulière avec pour objectif d’apporter des conseils techniques, une organisation et des moyens aux responsables des écoles de golf
- Mettre en place des entraîneurs départementaux et de ligues neutres (qui n’appartiennent à aucun club), pour garantir aux jeunes des petits clubs de ne pas être « piqué ou démarché »
- Transformer les journées d’entraînement départemental/ligue non pas en journées techniques qui perturbent complètement les jeunes, mais en journées de situations à enjeux (match play ou autre) avec un encadrement neutre
- Aider les 2 ou 3 circuits jeunes à se développer sur toutes les régions en France, prendre en charge une partie des frais pour les élèves des écoles les plus méritants
- Aider toutes les structures à mettre des départs adaptés aux catégories des jeunes et homologuer rapidement ces parcours
- Mettre en place des éléments pour qu’il soit compliqué pour les gros clubs de recruter les jeunes prometteurs formés dans les petits clubs
- Développer au maximum le golf scolaire, donner les moyens aux clubs de le faire
- Mettre en place des accords avec les chaînes TV publiques pour diffuser le golf (émissions, reportages, compétitions)
Quel statut pour l’enseignant ?
Pour finir sur le statut de l’enseignant, il convient de remarquer qu’il soit salarié, libéral ou les 2, les visions du métier sont très proches et que le quotidien est similaire : cours collectifs, cours individuels, école de golf, entraînement d’équipe, cours collectifs débutants, initiations… Des différences existent tout de même avec des avantages et des inconvénients de chaque côté.
Sur le statut des élèves moniteurs, on constate toutefois une dérive : Les golfs facturent au même prix l’enseignement, qu’il soit dispensé par une personne diplômée ou non. Le salaire, en correspondance avec son statut est pourtant inférieur, puisque compris entre 500 et 900€/mois. Une réflexion est à étudier pour limiter les tarifs des élèves moniteurs de manière cohérente.
Pour conclure, nous restons optimistes pour l’avenir de notre sport et de notre profession. Nous sommes sûrs que nos expériences et nos idées seront entendues et partagées. Et nous nous tenons prêts pour participer à toute action de réflexion sur le sujet.