Tout ce qu’il faut retenir du deuxième grand oral de 90 minutes du président de la ffgolf. Sans détour, Pascal Grizot a répondu aux questions des journalistes et des internautes articulées autour de trois grands thèmes : le sport avec les résultats des golfeurs français et l’avenir de l’Open de France, les problématiques environnementales et enfin le rôle et les actions de la Fédération.
Des trois volets abordés, c’est surtout sur le sport et l’avenir du golf en France que le président de la Fédération française de golf (FFG) était le plus attendu. Pascal Grizot pointe des signes encourageants sur le plan sportif et explique qu’un combat quotidien est mené par la Fédération auprès de la filière et du gouvernement pour accélérer et rendre viable la transition écologique.
Viser l’excellence au niveau amateur
En ce qui concerne les résultats sportifs, Grizot persiste et signe. Les bons résultats futurs du golf français passent par la formation dès le plus jeune âge. L’accent va continuer d’être mis sur la détection et les moyens fléchés vers le très haut niveau amateur.
L’ambition demeure d’installer durablement des joueurs tricolores dans le top 20 mondial masculin ou féminin et ainsi de se donner « statistiquement plus de chances de gagner en Majeur » insiste Pascal Grizot qui explique ne regarder que les chiffres et ne pas mettre d’affect dans son raisonnement.
En résumé, les datas sont au cœur du système de détection et de formation du Centre de Performance de la Fédération. Les experts en sont convaincus : pour atteindre les sommets de la hiérarchie mondiale, il est incontournable d’avoir figuré parmi l’élite mondiale amateur précédemment !
Dans l’esprit de Grizot, il faut aussi faciliter le passage de ces futurs champions vers le monde professionnel et le président souhaite être force de proposition auprès des tournées historiques. « Je discute avec Keith Pelley, le CEO du DP World Tour, afin de créer un circuit de grandes épreuves amateurs européennes qui pourrait être une passerelle vers le Challenge Tour ou l’European Tour. »
Elargir la base en favorisant l’accès aux enfants
Les idées du président rencontrent également un accueil favorable dans les clubs. Les directeurs de golf en France (ADGF), dont la réunion annuelle s’est tenue il y a quelques semaines, ont proposé à la Fédération le retour du Brevet Sportif pour élargir la base des jeunes golfeurs. Ce “diplôme” doit permettre aux joueurs de moins de 16 ans, affichant un bon niveau, de jouer gratuitement partout en France.
« Je leur ai dit qu’ils ne pouvaient pas me rendre plus heureux, confie Grizot, qui désire impérativement endiguer une tendance observée chez les plus jeunes. On a remarqué que 70 % des enfants cessaient de jouer après 3 ans de pratique. C’était un chiffre que je ne pouvais pas accepter. »
Plus question de cantonner les enfants aux practices. Grizot veut les voir sur le parcours. La politique de réformes conduite dans les clubs et auprès des Ligues pour dynamiser les écoles de golf commence à porter ses fruits. « L’hémorragie est passée de 70 à 53 % en l’espace de deux ans », se félicite-t-il.
L’Open de France premier tournoi “boosté” co-sanctionné PGA Tour / DP World Tour ?
Le président n’oublie pas également la nécessité de posséder de “belles vitrines” comme l’Evian Championship, seul tournoi Majeur d’Europe continentale, et le navire amiral du golf professionnel français masculin, l’Open de France.
Je ne demande pas qu’un très gros tournoi vienne tous les ans en France mais on demande une rotation en Europe, qu’on le partage avec l’Espagne, la Suède et l’Allemagne
Celui-ci n’est clairement plus à la place qu’il mérite dans le calendrier du DP World Tour compte tenu de son statut de plus vieux tournoi d’Europe continentale. Mais difficile de faire infléchir la position du Tour européen quand le circuit préside lui-même à la destinée du tournoi en tant que promoteur.
La marge de manœuvre est donc réduite pour la ffgolf mais l’Open de France pourrait “monter en grade” dans les années à venir estime Pascal Grizot. Il rêve tout haut d’une épreuve co-sanctionnée par le PGA Tour avec une dotation “boostée”, c’est à dire autour de 20 millions de dollars pour obtenir le label “elevated”, ce qui garantirait la présence d’une grande majorité des stars du golf mondial au Golf National.
« Je ne demande pas qu’un très gros tournoi vienne tous les ans en France mais on demande une rotation en Europe, qu’on le partage avec l’Espagne, la Suède et l’Allemagne, souligne le président de la FFG. Qu’on vienne au moins une fois en France tous les quatre ans. C’est la promesse que m’a fait Keith Pelley (en 2021), grâce au rapprochement avec le PGA Tour. Un premier tournoi elevated (treize tournois qui ne se disputent pour l’instant qu’aux Etats-Unis) devrait se dérouler en 2024 en Espagne (à Madrid) et ensuite devrait venir le tour de la France (en 2025 en raison des Jeux olympiques à Paris un an avant). J’attends maintenant de voir.»
Interrogé sur l’arrivée des Saoudiens sur l’échiquier du golf mondial et l’émergence du LIV Golf, Grizot regrette simplement que la situation ne profite à personne et prône le dialogue. S’il n’a pas voulu prendre partie, ouvertement du moins, on l’a bien compris, sa position demeure tout de même de rester fidèle à ses interlocuteurs privilégiés que sont le PGA Tour et le DP World Tour.
Accélérer la transition écologique
Plus près de nous, la question centrale de l’avenir de la pratique du golf en France a été largement débattue.
« Les golfs en France sont plutôt un appui d’un point de vue écologique plutôt qu’un ennemi et j’ai été scandalisé cet été par les attaques faites au golf, notamment de la part de personnalités politiques qui ne connaissaient pas le dossier et qui enfonçaient des portes ouvertes (…) Les actes de dégradations sur les golfs sont plus graves encore », s’est ému le président de la ffgolf, toujours partant pour débattre avec les opposants, qu’ils soient politiques ou issus des milieux contestataires.
Les eaux usées pour lutter contre la sécheresse
La gestion de la ressource en eau fait actuellement l’objet d’intenses discussions au plus haut niveau de l’état. La ffgolf pousse pour une utilisation accrue de l’eau recyclée sur les parcours.
En Espagne, l’eau “grise” est utilisée dans l’agriculture. Pour produire des aliments que nous retrouvons dans nos assiettes ici. Et on ne pourrait pas arroser nos golfs avec ces eaux-là ?
« Comment expliquer qu’en Israël, on utilise 90 % de l’eau recyclée, en Espagne, c’est 15 % et en France, le chiffre n’atteint pas la barre des 1 % ?, s’interroge Pascal Grizot qui explique que le problème provient d’une législation trop frileuse basée sur une étude incomplète de l’Agence Nationale Sécurité Sanitaire Alimentaire Nationale (Anses) préconisant uniquement des mesures conservatrices.
« En France, il faut moins de 20 km/h de vent, l’absence d’habitation à moins de 300 mètres ou de chemin vicinal pour utiliser cette eau “grise”, assène Pascal Grizot. En Espagne, elle est utilisée dans l’agriculture. Pour produire des aliments que nous retrouvons dans nos assiettes ici. Et on ne pourrait pas arroser nos golfs avec ces eaux-là ? »
Au gouvernement on assure que la législation doit évoluer prochainement. On peut espérer que cela puisse prendre effet dès cet été et qu’à l’instar de ce qui va être testé au Old Course du Golf de Mandelieu, les golfs puissent se raccorder à une usine de traitement des eaux. Ce changement combiné à l’installation de systèmes d’irrigation modernes, pourraient même faire faire d’importantes économies aux golfs.
« Dans certains pays comme la Hollande, aucun parcours n’est arrosé avec de l’eau propre, seulement avec de l’eau de stockage ou même leur propre eau recyclée avec des systèmes de lagunage (Ndlr, technique naturelle d’épuration des eaux). L’eau est filtrée naturellement en circulant dans des cailloux, du sable », précise Grizot.
Depuis le Covid et depuis la sécheresse, je pense que les golfeurs ont compris qu’il fallait avoir une Fédération forte et donc la soutenir
L’échéance de 2025 et l’interdiction des produits phytosanitaires
Autre question à laquelle tente de répondre le président de la ffgolf : Comment anticiper la promulgation en 2025 de la loi Labbé qui interdira l’usage des produits phytosanitaires dans les espaces verts publics ? À cette problématique, Pascal Grizot souhaite que le golf se montre exemplaire.
« On a décidé de créer un outil digital – “plateforme golf” où tous les greenkeepers vont devoir renseigner ce qu’ils consomment en eau, en produits phytosanitaires, mais aussi qu’ils indiquent les opérations mécaniques réalisées sur leurs golfs car après 2025 on ne pourra plus utiliser les produits phytosanitaires, sauf dérogation pour des maladies qu’on ne peut pas traiter autrement. »
Opérationnelle dès cet été, cette plateforme aura pour principal objectif d’apporter les “preuves” à ceux qui prennent les décisions en haut lieu, d’un entretien vertueux des parcours, afin de justifier, si besoin en est, l’obtention de dérogations. Parallèlement des centres de recherche réfléchissent à comment trouver des produits «moins agressifs» martèle Pascal Grizot.
« Depuis le Covid et depuis la sécheresse, je pense que les golfeurs ont compris qu’il fallait avoir une Fédération forte et donc la soutenir. » Prendre sa licence n’est pas réservé à ceux qui jouent en compétition mais c’est un acte responsable qui participe à aider la filière et par conséquent à jouer au golf.
En effet, 20 millions des 32 millions d’euros de budget annuel de la ffgolf proviennent de la vente de licences.
Pas de baisse du coût de la pratique
Malgré les deux années record en terme de licenciés, Pascal Grizot ne veut pas se réjouir trop tôt. Devenu 4e Fédération sportive nationale, le golf pâti toujours de l’étiquette de « sport de nantis et de vieux”.
C’est illusoire d’affirmer que tout le monde peut jouer au golf, pour pas cher. C’est un sport qui a un coût
Pour le président, la démocratisation ne doit pas conduire à renier ses valeurs. « Vous imaginez bien que les 442 000 licenciés ne sont pas tous des nantis… Nos valeurs ne sont pas celles d’un sport de riches mais plutôt d’un sport universel pratiqué dans plus de 170 pays dans le monde. C’est sur cette image que l’on doit travailler… Mais c’est illusoire d’affirmer que tout le monde peut jouer au golf, pour pas cher. C’est un sport qui a un coût. »
La conjoncture économique et les enjeux sociétaux ne sont pas compatibles avec une baisse du prix de la pratique. Comme d’autres disciplines sportives, dont les tarifs n’ont cessé d’augmenter. « On demande aux golfs de devenir différents de ce qu’ils étaient il y a 15 ans. En plus de la forte inflation actuelle va s’ajouter l’inflation sur les moyens qui devront être mis en place pour continuer à entretenir les golfs. »
Pascal Grizot rappelle quand même qu’en France on peut jouer le parcours fleuron du Golf National, qui a accueilli la Ryder Cup (en 2018) et bientôt les JO pour 3 ou 4 fois moins cher que ce qui se pratique en Angleterre ou aux États-Unis sur les “grands” parcours de l’Open Britannique ou de l’US Open.
Pour conclure, on devine que Pascal Grizot, dont le mandat arrive à terme fin 2024, se verrait bien rempiler pour poursuivre ses réformes et récolter les premiers dividendes de son travail. « J’aime passionnément ce que je fais, je me rends bien compte que pour que la politique qu’on met en place porte ses fruits, il faudrait que je fasse un autre mandat. Aurais-je envie de le faire ? Est-ce que ma famille acceptera que je le fasse ? Je verrai. »
Il aimerait aussi que la France se porte candidate pour l’obtention de l’organisation de la Solheim Cup mais cherche encore la personne idoine à la Fédération pour mener à bien ce projet d’envergure.
Le résumé du Grand Live
L’intégralité du Grand Live diffusé en direct