Matthieu Pavon est à pied-d’œuvre à Augusta où il s’apprête à devenir le 12e joueur français de l’histoire à disputer le Masters. Le Bordelais a partagé avec Golf Planète ses souvenirs du tournoi, ses premières impressions dans ce lieu mythique qu’est l’Augusta National, sa découverte du parcours et son état d’esprit avant de vivre une semaine comme à nulle autre pareil.
Propos Recueillis par G.B.
Matthieu, qu’est que cela représente pour toi de jouer le Masters pour la première fois, à 31 ans ?
Matthieu Pavon : C’est à la fois un accomplissement et une grande opportunité. Un accomplissement parce que pour se qualifier, il fallait figurer parmi les 50 meilleurs joueurs du monde et c’était un objectif de longue date que j’ai pu atteindre en début d’année. C’est génial, c’est une case cochée dans ma carrière. Maintenant, c’est aussi une opportunité à saisir. Gagner sur le Tour européen, c’est fait. Gagner sur le PGA Tour, c’est fait. La marche au-dessus, ce serait de gagner un Majeur. Cela me donne une chance de plus de me rapprocher de mes rêves.
Une chance de plus de me rapprocher de mes rêves
En quoi le Masters est-il différent des autres Majeurs, et notamment de ceux que tu as pu jouer par le passé (trois US Open et un Open britannique) ?
M.P. : Il est vraiment spécial ! Évidemment le fait que ce soit le même parcours chaque année, depuis sa création (NDLR – première édition en 1934) contribue au côté mythique du tournoi. Retrouver les mêmes lieux chaque année, avec ce parcours manucuré, ce vert qui domine partout, les traditions, ces grands bâtiments blancs typiques de l’état de Géorgie… C’est un tournoi chargé d’histoire. C’est aussi celui qui est réservé aux meilleurs des meilleurs. Il est très difficile de s’y qualifier. Oui, il est spécial.
Quelle est l’histoire entre toi et le Masters ?
M.P. : J’ai un souvenir fort, le chip rentré de Tiger Woods au 16 en 2005. C’est vraiment le souvenir qui m’a le plus marqué.
Je me souviens aussi de l’albatros de Louis Oosthuizen au trou n°2 en 2012. Et puis aussi, même si c’est plus négatif, le « sabotage » de Jordan Spieth au trou n°12 (NDLR – quadruple bogey en 2016 alors qu’il était en tête et bien parti pour un doublé). C’est vraiment un tournoi que j’ai toujours eu du plaisir à suivre à la télévision et généralement, je ne manque pas une seule édition derrière mon écran.
Le 1er avril, tu as visité pour la première fois l’Augusta National lors d’une partie de reconnaissance avec Shane Lowry. Quelles ont été tes premières impressions ?
M.P. : D’abord c’est la traversée de Magnolia Lane qui m’a marqué. C’est une allée absolument magnifique et mythique. Quand tu arrives au bout de ces 300 mètres, tu découvres le logo d’Augusta en fleurs sur le rond-point… C’est un émerveillement. On se croirait presque dans un film, c’est un peu le générique qu’on voit passer à la télé mais en réel. On devine les traditions un peu partout dans le club. Et puis je dois dire que je me suis senti un peu inconfortable, j’avais peur de faire une bêtise, de ne pas être au bon endroit. C’est un sentiment très spécial, difficile à décrire mais on apprécie totalement les minutes passées sur place !
J’étais émerveillé mais aussi un peu inconfortable la première fois, on a peur de ne pas être au bon endroit, de faire une bêtise avec toutes ces traditions
Et concernant le parcours, quelles ont été tes premières impressions ? L’avais-tu testé en jeu vidéo comme d’autres parcours du PGA Tour ?
M.P. : Non, je n’avais jamais joué Augusta à la Playstation. C’est qui est frappant, c’est qu’on est jamais à plat. Il y a du dénivelé un peu partout, du tee au green. Les greens sont ondulés, autour des greens il y a des « mouvements ». C’est assez impressionnant. Rien n’est plat. Ce n’est pas facile à gérer, le parcours est vraiment très piégeux. Donc ça va être un test intéressant…
As-tu évoqué les particularités du parcours avec Thomas Levet, que tu côtoies régulièrement en Floride et qui a bien joué au Masters (13e en 2005, meilleur résultat de l’histoire pour un Français) ?
M.P. : Oui, avec Thomas, on a un peu « survolé » chaque trou et évoquer quels pouvaient être les pièges pour chacun d’entre eux. Thomas m’a aussi demandé comment j’avais vécu mes parties de reconnaissance. On s’est fait une idée globale sur les positions de drapeau, sur ce qui doit être fait ou ne doit pas l’être, les attaquer ou ne pas les attaquer et comment.
Justement, les emplacements de drapeau sont presque toujours les mêmes. As-tu prévu une stratégie pour chaque jour et chaque emplacement ou comptes-tu laisser jouer ton feeling, parfois ?
M.P. : Non, ce n’est pas le type de parcours où on laisse jouer le feeling. La seule place à l’improvisation, ça sera de décider si oui ou non j’attaque tel ou tel par 5 en fonction de la qualité de mon drive. Ça sera la seule « variable ». Je pense que c’est un tracé qu’il faut jouer pour la majorité des joueurs de la même façon. Il faut toujours jouer les mêmes zones selon les drapeaux. Donc nous allons mettre en place une stratégie et je n’en démordrai pas.
Quel sont les trous qui t’ont le plus séduit ou surpris ?
M.P. : Le premier drive est impressionnant. Le 9 réclame un 2e coup assez compliqué, avec énormément de dénivelé. Ma partie préférée du parcours, ce sont les 9 trous du retour et en particulier l’Amen Corner. C’est d’une pureté absolue.
Est-ce que la difficulté presque “mythique” des greens d’Augusta t’a conduit aussi à une préparation particulière ?
M.P. : Oui, absolument, avec mon coach de putting on a légèrement adapté mon programme. On a essayé de mettre dans mes séances des putts avec beaucoup de break pour essayer de se préparer au mieux à ce test.
Comment t’es-tu organisé pour l’hébergement cette semaine et combien de fois comptes-tu repérer le parcours avant le premier tour jeudi ?
M.P. : J’ai loué une maison sur place, à proximité du club, avec les membres de ma famille, ma femme, mes parents, mes frères. Adrien Saddier est là aussi avec moi. Je vais jouer neuf trous ce lundi, neuf trous mardi, et mercredi est une journée assez spéciale, donc je vais voir plus tard comment je m’organise. Je ne sais pas encore si je vais jouer le concours de par 3.
Ce qui est sûr, c’est que le leitmotiv de cette semaine sera de prendre du plaisir. J’aborde aussi cet événement avec beaucoup d’envie… mais aussi de concentration. Le parcours l’exige !
About today…
Thanks @ShaneLowryGolf being such a gentleman with me today @PGATOUR @TheMasters pic.twitter.com/iHSkNrcqNV— Matthieu Pavon (@matthieupavon) April 1, 2024
© Andrew Redington / GETTY IMAGES EUROPE / Getty Images via AFP