Pour mieux découvrir le parcours du Royal Troon, rien de tel que de suivre « derrière les cordes » le n°1 français Matthieu Pavon. Récit d’une « reco » pleine d’enseignements.
De notre envoyé spécial à Troon, G.B.
Le Royal Troon est, à l’image de St Andrews, un parcours au double visage. Les neuf premiers trous, joués avec le vent du Nord qui pousse favorablement, sont plutôt « aimables ». Les neuf trous du retour, eux, sont redoutables et forment peut-être le « back nine » le plus difficile en Majeur quand l’anémomètre s’affole.
Ce mardi matin à Troon, on a suivi sur la partie la plus scorable du parcours Romain Langasque, auréolé de son podium au Scottish Open et en pleine confiance comme il nous l’a confié après cette « reco ». Les tout premiers trous, notamment les trois premiers par 4 du parcours qui réclament a priori juste un fer 4 au départ et un wedge au second coup pour ces champions, sont donc des opportunités de birdies. Tout comme le très long par 5 du 6, qui, s’il est presque inatteignable en 2, est finalement assez jouable en régulation.
Le minuscule par 3 du 8, le « postage stamp », est, lui aussi, maîtrisable si le vent est modéré. A condition de ne pas finir dans les horribles bunkers qui l’entourent.
Mais sur le retour, c’est une autre affaire ! On a bifurqué ensuite vers Matthieu Pavon, qui s’est testé sur ce « back nine » en solo. Le 22e mondial avait joué la veille les neuf trous de l’aller. Il a cette fois eu tout le loisir, puisqu’il n’avait pas de partenaire de jeu à ses côtés, de jouer plusieurs balles pour bien appréhender les pièges du retour.
Le précieux Mark Sherwood
Et il y en a beaucoup ! Ça commence sur les trous n°10 et n°11 où il faut trouver la bonne ligne sur les mises en jeu jouées à l’aveugle. Le vent se lève, la pluie s’en mêle (un peu) mais le Français s’en sort très bien. Ce qui nous frappe, c’est qu’il échange énormément avec son caddie, l’expérimenté Mark Sherwood, presque 38 ans de circuit, le seul à l’accompagner ce jour sur le parcours avec l’un de ses deux frères, Martin.
Le 12, un par 4 de 412 mètres, est à dimension humaine. Mais le Bordelais est confronté à quelques problèmes de drive. Il s’y remet à plusieurs fois sur le tee du 13. Le vent est devenu de plus en plus fort. Il échange de plus en plus sur ce sujet avec son « looper » qui semble vouloir lui redonner confiance. Le reste de son jeu, les fers longs, le chipping, les sorties de bunker, tout semble réglé comme une horloge.
Les choses se corsent vraiment sur le monstrueux par 4 du 15, LE trou le plus dur du parcours. 460 mètres avec 40 km/h en pleine face, c’est un défi ! Il s’y reprend à quatre fois sur son drive. La première balle a trouvé le fairway, mais n’a pas pris l’effet qu’il escomptait. Les deux suivantes s’échappent à droite, son fade trop prononcé est accentué par le vent, direction le gros rough.
Des fans avides d’autographes
Le « Frenchie » s’arrête au départ du 16 où il signe de nombreux autographes. Souriant et disponible, même si on devine qu’il aimerait mieux maîtriser son driving. Cette fois, il suit à la lettre la ligne indiquée par son caddie et touche la terre promise. Beaucoup de joueurs ont tenté de jouer le « driver on the deck » (sur le fairway) pour tenter de toucher ce par 5 en deux face au vent. Matthieu s’y essaie aussi.
La première tentative est plutôt réussie, la deuxième s’égare dans les hautes herbes à droite. Impossible de retrouver la balle. Le 5e du dernier US Open s’exerce ensuite à plusieurs chips autour de ce green, dans des positions délicates. Tous sont touchés à merveille.
Arrive le par 3 du 17. Un monstre. 221 mètres gros vent de face ! Avec un petit crachin pour corser le tout. Le coup de bois 3 du Français, bien frappé, atterrit dans le bunker frontal. De cette situation délicate, le vainqueur du Farmers Insurance Open délivre en souplesse, et sous les bravos du public, une sortie de 20 mètres « donnée ». La classe.
Petit jeu de velours, driving difficile
Le trou final, un par 4 de 420 mètres, est lui aussi une bonne bouchée, avec d’innombrables bunkers de fairway. L’arrive majestueuse vers le club-house et sa baie vitrée qui offre aux « members » une vue unique sur le green est, à notre goût, plutôt émouvante.
Mais évidemment, le joueur ne se laisse pas distraire par l’atmosphère « so british ». Il s’exerce d’abord à taper des longs coups de fer sous le vent, puis reprend ses gammes au chipping autour du green. Une fois encore, c’est un régal et un quasi sans-faute avec son fameux grip inversé.
En un peu plus de deux heures, on a pu jauger de toute la difficulté des neuf trous du retour du Royal Troon, de l’excellence de Matthieu Pavon dans le petit jeu, de ses quelques difficultés du moment avec son driver, mais aussi et surtout de sa popularité auprès du public britannique. Et de sa disponibilité.
Demain est un autre jour, mais avec une telle aisance autour des greens, le premier Français vainqueur sur le PGA Tour semble prêt pour un nouveau coup d’éclat en Majeur !
© G.B.