Rory McIlroy et son sabordage à l’US Open, la calamité du jeu lent dans le golf professionnel, l’érosion à la fois des tournois née de la guerre des Circuits et de leurs audiences télévisées, le désintérêt général pour la Presidents Cup, l’énième vrai-faux retour de Tiger Woods aux affaires… La rédaction de Golf Planète revient pour vous sur les faits à oublier de cette année 2024… …
Par G.B., N.C., D.C., D.M., F.S., E.S. et L.V.
Rory et ses vieux démons…
« Rory… Pas ça, pas maintenant, pas après tout ce que tu as fait. Cette fois c’était la bonne, c’était sûr, après tant d’échecs, après le 150e The Open à St Andrews qui t’avais glissé entre les doigts lors des derniers trous, après 10 ans sans Majeur, la malédiction devait prendre fin à Pinehurst. Et puis il y a ce putt minuscule raté au 16. Ce finish nerveux. Ce nouveau petit putt manqué au 18. Et c’est Bryson DeChambeau qui décroche la timbale. Un joueur du LIV Golf en plus. Rory, tu m’as presque brisé le cœur. Sans vouloir être manichéen, pour moi McIlroy est un peu le dernier défenseur des belles valeurs du golf face à ceux qui ne jurent que pour l’appât du gain. Mais mon joueur préféré a encore perdu. Il a même craqué, il faut bien le dire. Même si ça le rend encore plus humain, ça a été dur d’écrire des lignes pour raconter ce nouvel échec, ce désastre… »
Jeu lent, arrêtez le massacre s’il vous plait !
« La longueur des parties a atteint des sommets cette année, poussant à bout certains pros comme Lucas Glover, qui dit avoir vu le rythme de jeu se dégrader progressivement, ou Charley Hull (photo ci-dessous), qui a proposé une pénalité de deux coups pour chaque dépassement de temps et d’enlever la carte au bout de trois pénalités. Plus que les changements récemment adoptés par le PGA Tour, censés y remédier, il serait temps que les circuits professionnels s’inspirent du LIV Golf, exemplaire sur ce point puisqu’il sanctionne plus fréquemment et plus sévèrement ces infractions. Et si on commençait tout simplement par appliquer les règles ? »
Presidents Cup, plus stop que encore…
« La Presidents Cup, cet ersatz en décrépitude de la Ryder Cup pour le reste du monde, continue avec cette édition 2024 de creuser sa tombe encore plus profond que les divots sur les fairways du Montréal Golf Club. Aucun intérêt sportif cette année encore (victoire sans conteste des Etats-Unis, la 13e en quinze éditions), ambiance quasi inexistante au Canada (difficile de créer un antagonisme à partir d’une rivalité qui n’existe pas) et écart de niveau abyssal. A quand le changement vers une compétition mixte pour rebattre les cartes d’une biennale vouée à tomber dans le désintérêt, humiliation après humiliation ? »
Le golf pro joue avec le feu
« Le départ de Jon Rahm sur le LIV Golf à la fin de l’année 2023 a porté un coup certainement fatal au fragile équilibre du golf professionnel malmené par l’émergence du circuit financé par le Fonds d’investissement public (PIF) d’Arabie saoudite. Vainqueur du Masters quelques mois plus tôt et principal rival de Scottie Scheffler et de Rory McIlroy au classement mondial, personne ne s’attendait à le voir quitter le navire et céder lui aussi aux sirènes des pétrodollars. Passé l’électrochoc de cette annonce, force est de constater que le séisme provoqué par l’exode de certains des meilleurs joueurs du monde ces dernières années a conduit à l’inexorable dislocation du golf pro et au chaos avec des conséquences terribles. De l’érosion de l’intérêt sportif des tournois découle l’érosion des audiences télés. Seuls les tournois du Grand Chelem échappent encore à la désaffection générale et parviennent à retenir devant leur petit écran les plus mordus d’entre nous. Jusqu’à quand ? Il serait temps de siffler la fin de la récré. »
Jay et Yassir, le jeu de dupes
« Il fallait vraiment être le dernier perdreau de l’année pour croire à cette pantalonnade offerte sans le moindre scrupule lors du dernier Dunhill Links Championship par Jay Monahan, le commissaire du PGA Tour, et Yassir Al-Rumayyan, gouverneur du Fonds d’investissement public (PIF) d’Arabie saoudite, soutien financier XXL du LIV Golf. Ces deux-là ont multiplié en effet les « gestes d’apaisements » gros comme une corde d’amarrage. Embrassades, éclats de rires, regards complices… Ils se sont mêmes retrouvés dans la même partie – comme par hasard ! – lors du premier tour, l’un faisant équipe avec Billy Horschel (Monahan), l’autre avec l’un de ses riches pensionnaires (le Sud-Africain Dean Burmester). A voir ces images, on était quasiment sûr que le rapprochement tant attendu entre les deux entités – ça fait plus d’un an et demi qu’on discute – allait enfin être acté. Pour le bien du golf mondial. Fin décembre, rien n’avait bougé. Les rumeurs d’un accord circulent chaque semaine, les meilleurs joueurs du monde espèrent une issue favorable… Mais on ne voit toujours rien venir… Désespérant ! »
La tragédie Grayson Murray…
« La guerre des circuits, les bons ou mauvais résultats des uns et des autres… Tout cela devient dérisoire face à la tragédie qu’est le décès d’un joueur. Malgré une victoire en début d’année (au Sony Open in Hawaï), Grayson Murray n’a pas réussi à vaincre le mal-être qui le rongeait. Si la vie de joueur professionnel, rythmée par le golf et les voyages, peut sembler enviable, elle est loin d’être idyllique pour certains d’entre eux, tiraillés par la pression constante et l’éloignement de leurs proches. Les Américains Bubba Watson ou Matthew Wolff en ont fait part il y a quelques années, Mike Lorenzo-Vera a mis sa saison entre-parenthèse et parlé de ses problèmes. Dans ce tableau sombre, une lueur d’espoir subsiste cependant : la santé mentale des golfeurs, et plus largement des sportifs, est désormais un sujet davantage abordé. Cela pourrait encourager la parole et, espérons-le, éviter un nouveau drame. »
L’énième vrai-faux retour de Tiger Woods en 2024
« Difficile de critiquer Tiger Woods, un des meilleurs golfeurs de tous les temps. Mais on aurait aimé justement pouvoir célébrer dignement la fin de carrière de ce monstre sacré du golf. En 2024, le Tigre n’a joué que les quatre tournois Majeurs (il a abandonné après un tour et demi au Genesis Invitational en février), pour trois cuts manqués et une 60e place au Masters. Depuis la pause Covid début 2020, l’homme aux quinze victoires en Grand Chelem n’a signé qu’un seul top 20 (18e), au Hero World Challenge qu’il organise… avec vingt joueurs au départ. C’est donc un peu une nouvelle tant redoutée « saison de trop ». La cinquième ! On se réjouit systématiquement de le voir au départ d’un tournoi, mais l’excitation laisse rapidement place à la déception. Pour la première fois de sa carrière, il a même reconnu cette année ne plus être en mesure de rivaliser avec les meilleurs. Sa récente prestation au PNC Championship avec son fils Charlie a été plutôt rassurante sur son état de santé puisqu’il a swingué et marché sans contrainte visible. Mais la bagarre dans ce tournoi familial s’est principalement déroulée face à Bernhard Langer (67 ans) et Vijay Singh (61 ans). Pour le voir performer face à ses contemporains, il faudra certainement attendre le PGA Tour Champions… en 2026. Après une sixième saison de trop en 2025 ? »
Photos : Warren Little, Jared C. Tilton, Angel Martinez, Christian Petersen/Getty Images/AFP, James Nix/USGA