Si le succès indéniable des épreuves de golf aux Jeux de Paris 2024 a clos le débat sur la légitimité de la discipline dans le paysage olympique il en reste pas moins que le format de la compétition n’est probablement pas le meilleur pour cet événement.
Dans le concert de louanges qu’ont reçu les épreuves de golf pendant ces jeux olympiques, il convient de noter quelques petits bémols. Ils concernent la formule de jeu qui depuis le retour du golf à Rio en 2016 fait débat.
Le stroke play a ceci d’intéressant qui laisse planer l’incertitude sur l’identité du vainqueur jusqu’au bout, le plus souvent. Le suspense a duré jusqu’au 72e trou entre Scottie Scheffler et Tommy Fleetwood. Il a aussi laissé espérer la possibilité d’un podium pour Victor Perez jusqu’à la fin.
Même constat chez les femmes avec les rivales de Lydia Ko, qui certaines, ont craqué avant le sprint final mais une incertitude pour le podium qui a bien duré jusqu’au bout.
Un manque d’intérêt pour les distancés…
Mais avec simplement 3 places récompensées et aucun autre objectif pour les joueurs et les joueuses à quoi bon faire jouer les “décrochés” jusqu’au bout ? C’est un peu ce qu’à voulu dire Matthieu Pavon, en délicatesse avec son jeu toute la semaine quand il a reconnu qu’il ne méritait pas de disputer les deux derniers tours.
Les 60 joueurs et joueuses en lice n’ont pas tous vibré du premier au dernier jour avec l’espoir d’un podium comme Victor Perez ou Céline Boutier. Cette formule de quatre tours en stroke play, sans cut, pour déterminer les 3 médaillés, est assez critiquée.
Beaucoup reprochent à la Fédération Internationale de Golf (IGF) de ne pas avoir saisi l’occasion de proposer un spectacle différent du “ronronnement” d’un tournoi classique.
…et pour les télévisions
Au-delà du désintérêt de conserver des athlètes qui n’ont plus aucune chance de médaille, le « stroke » ne permet pas forcément d’apporter la meilleure lecture de jeu à ceux qui ne suivent pas le golf tout au long de l’année. Ni de bien identifier, le cas échéant, quel coup est décisif.
Et cette formule au long cours pose surtout un important problème aux diffuseurs. Impossible de consacrer des heures d’antenne (ou même de longues minutes) lors des 3 premiers jours alors que la course aux médailles n’a pas commencé à se décanter et que d’autres épreuves au rythme plus “punchie” se disputent en même temps. Au grand dam des téléspectateurs.
La mixité en question
Alors un changement est plus que souhaitable.
Qu’en sera-t-il dans quatre ans à Los Angeles ? Une épreuve… mixte pourrait voir le jour. L’IGF a soumis au Comité international olympique une idée de compétition entre 16 équipes (un homme et une femme parmi les 60 qualifiés pour les deux sexes) sur le Riviera Country Club avec un tour en foursomes et un autre en 4 balles.
On peut être un peu dubitatif sur l’intérêt de cette mixité. D’abord parce que ces épreuves mixtes, expérimentées par le passé notamment sur le DP World Tour, et sur le PGA Tour sont encore balbutiantes. Ensuite parce que cela retirerait, de facto, une épreuve et réduirait donc le nombre de médailles attribuées aux athlètes.
D’autres propositions sont cependant sur la table avec un nombre de participants similaire.
Vive le match play !
En effet 60 joueurs et 60 joueuses sur la ligne de départ, cela semble idéal, pour à la fois ne pas alourdir les problèmes d’hébergement (n’oublions pas les caddies !), et pour garder de la lisibilité envers un public pas forcément averti des choses du golf, mais qui peut se passionner facilement pour la course aux médailles. Un champ supérieur serait a priori trop compliqué à gérer.
Le mode de sélection pourrait ne pas être conservé. L’utilisation des points mondiaux semble logique, sauf depuis que le golf masculin traverse une crise (la trop fameuse guerre des circuits) qui impacte directement la crédibilité de l’OWGR.
Pourquoi ne pas offrir directement une qualification pour les J.O. à ceux qui s’imposent dans un tournoi Majeur lors de la dernière année de l’olympiade ? La sélection de Wyndham Clark au profit de Bryson DeChambeau, celui qui lui a succédé au palmarès de l’US Open, a de quoi faire tousser. Le sacre de BDC à Pinehurst n’a pas suffi au classement pour dépasser Clark. Même Rory McIlroy s’est ému de ce mode qualificatif.
Enfin, le format. Trois options sont envisageables pour améliorer le suspense, rendre plus lisible le tournoi pour le profane et segmenter la discipline pour séduire les diffuseurs.
L’option 1 tout d’abord :un tableau de simple à élimination directe, avec un premier tour, des seizièmes de finale, des huitièmes, des quarts, des demies, la petite et la grande finale avec des affrontements sur 18 trous en match play. Exactement sur le modèle du tennis, en somme.
L’option 2 serait de conserver deux premiers tours de stroke play, puis de débuter le tableau de match play à élimination directe à partir des 16e de finale, en ne conservant donc que les 32 meilleurs joueurs du champ après 36 trous.
Enfin il y a l’option 3, qui serait de créer des duos par nation et de disputer des matchs de quatre balles. Trente-deux équipes, du quatre balles sur 18 trous, de l’élimination directe, cinq tours de compétition (les deux derniers, les demi-finales et les finales, le même jour).
Cette option aurait le mérite d’insuffler un surcroit d’esprit d’équipe autour de la compétition, mais aurait aussi le désavantage de faire apparaitre le risque de voir de grosses têtes d’affiche être sorties rapidement…
Quoi qu’il en soit, le sel du match play ne peut plus être ignoré. L’immense succès de la Ryder Cup et à un degré moindre de la Solheim Cup tient aussi beaucoup à cette formule que l’on peut juger plus aléatoire que le stroke play, mais qui fait davantage vibrer les foules.
On l’a constaté le tournoi olympique de golf est un événement qui gagne à être connu. Mais cela n’exclut pas une forme de remise en question.
©Kevin C. Cox / GETTY IMAGES EUROPE / Getty Images via AFP