C’est l’heure de faire les comptes et de dresser un bilan du Masters. Une 87e édition pas comme les autres et forcément très riche en enseignements… Voilà les 10 leçons à tirer de ce premier majeur de la saison 2023.
Le boss, c’est Jon
Il y a bien sûr eu un petit coup de pompe en mars qui a interrogé, avec un abandon au Players Championship et un WGC match play décevant. Mais pour le reste, Jon Rahm écrase la concurrence depuis le début de l’année. Ce triomphe au Masters, obtenu de main de Maître est son 4e titre après ceux du Genesis Invitational, de l’American Express et du Sentry Tournament of Champions. Le Basque avait aussi accumulé trois « top 10 ». Et nous ne sommes que le 10 avril.
Scottie Scheffler est probablement son rival n°1, mais l’Américain, solide 10e et un peu nerveux sur les greens à Augusta alors qu’il défendait son titre (-1,16 au stroke gained putting), ne peut prétendre à une telle régularité dans la haute performance. Le boss du golf mondial en ce début d’année, c’est Jon, et cette sentence ne souffre aucune contestation. Sans pépin physique sa domination pourrait bien durer.
Jon Rahm wins the Green Jacket. #themasters pic.twitter.com/WZ2P2ehDP7
— The Masters (@TheMasters) April 9, 2023
Augusta, à nul autre pareil
L’Augusta National est décidément un terrain de jeu aussi magique que mystérieux. Sur quel autre parcours un joueur de 63 ans (Fred Couples) peut espérer franchir le cut face aux ténors et autres canonniers de 30 ans et moins ? Sur quel autre parcours un joueur en pleine disgrâce et en total manque de résultat sur un circuit à 48 joueurs peut-il briller contre toute attente (Phil Mickelson) ?
La connaissance des greens, des zones à éviter, la créativité et un “on-ne-sait-quoi ” de surnaturel, de l’ordre du magique, peut permettre à un amoureux des lieux, de déjouer tous les pièges et les pronostics. Même le cut passé par Tiger Woods sur une jambe flirte avec l’irrationnel…
Fred Couples and Augusta National, a friendship that spans decades. #theMasters pic.twitter.com/EO8Vvsb9Cn
— PGA TOUR Champions (@ChampionsTour) April 10, 2023
Tiger, c’est (probablement) fini
L’idylle entre Tiger Woods et le Masters a certainement pris fin lorsque le quintuple vainqueur du Masters a publié un communiqué laconique dimanche 9 avril, pour signifier son abandon. La veille ses fans l’imploraient de mettre fin au jeu de massacre après la diffusion des terribles images de son claudiquement dans la foulée de l’interruption définitive du jeu samedi. Il les a écoutés.
Visiblement vaincu par la douleur, le quintuple vainqueur du tournoi a dû renoncer à jouer les derniers trous comme il l’espérait et malgré un 23e cut passé consécutivement.
Reverra-t-on la légende au départ du Masters en compétition ? Compte tenu de ses limites physiques et des dénivelés à Augusta, il est permis d’en douter, même si on ne l’espère pas.
McIlroy, un sérieux blocage
Rory McIlroy a un sérieux problème avec les majeurs. Il n’en a plus gagné depuis 2014 et on peut se demander s’il retrouvera le chemin de la victoire.
Alors qu’il était très attendu au Masters, le seul majeur qui manque à son palmarès, alors qu’il s’y était entraîné avec rigueur, qu’il avait même effectué des changements de matériel en conséquence, le Nord-Irlandais s’est complètement “troué” à Augusta.
Trop impatient dans ses choix, désordonné dans son swing, il a rendu une affreuse carte de 77 le deuxième jour. Le blocage mental est indéniable. Comment le solutionner ? Peut-être en sortant d’une forme de déni… Sûrement pas, en tout cas, en continuant à accorder des interviews au diffuseur américain pendant le jeu via par téléphone comme l’a expliqué Nick Faldo.
On n’a pas vu Jon Rahm se prêter à ces “simagrées” qui n’apportent pas particulièrement un plus à la retransmission. Equipons les caddies de micros, il sera bien plus instructif d’écouter les conversations entre le jouer et son conseiller numéro 1, un peu à la manière de ce qui se pratique en F1 entre le pilote et son team. En tout cas ces interventions inopinées ne réussissent pas à Rory.
Koepka manque au PGA Tour
Parti sur le LIV, Brooks Koepka est incontestablement le joueur avec Smith que les fans regrettent le plus sur le PGA Tour.
Le quadruple vainqueur en majeur a fait le spectacle pendant les deux premiers tours à Augusta. Étonnamment, il a coincé le dimanche et s’est fait déborder par Jon Rahm, un peu comme le patron du LIV, Greg Norman quand il s’est effondré lors du dernier tour en 1996. Lui aussi été en tête après deux tours au Masters avec un -12 record. En laissant la victoire à Rahm sans vraiment lutter, Koepka a rejoint l’Australien dans les annales du tournoi.
Interloqué par sa contreperformance dominicale, Koepka avait reconnu plus tôt dans la semaine que les joutes face aux meilleurs du monde lui manquaient. Il a perdu celle-ci, mais son retour au plus haut niveau, après une blessure au genou qui l’a handicapé de longs mois, est une bonne nouvelle pour le golf mondial. Sauf qu’on ne le reverra pas dans les grands tournois du circuit américain, hormis en majeurs…
Peut-être se pose-t-il la question d’un retour vers le PGA Tour, mais cela semble contractuellement difficile. Dommage.
Two birdies in a row and Brooks Koepka moves to solo-second place. #themasters pic.twitter.com/Nf4eyk9oz7
— The Masters (@TheMasters) April 9, 2023
L’Europe n’est pas morte
Bien sûr, il y a eu le triomphe de Jon Rahm, mais pas que… Les autres joueurs européens ont offert quelques motifs de satisfaction au capitaine de Ryder Cup Luke Donald, dans la perspective de la bataille de Rome. Viktor Hovland (7e) et Matt Fitzpatrick (10e) s’offrent un “top 10”, Justin Rose et Shane Lowry un “top 20”. Ce n’est pas “dingue” surtout si l’on compare aux Américains qui sont 10 parmi les 13 premiers, mais c’est un signe positif qui vient adoucir l’amertume ressentie après le Championnat du Monde de Match Play notamment.
If you don’t laugh you’ll cry… wasn’t to be today but proud of how I battled… onwards and upwards ☘️ #themasters pic.twitter.com/HJqU1aN8zv
— Shane Lowry (@ShaneLowryGolf) April 9, 2023
Lent, si lent, trop lent
Encore une fois, l’extrême lenteur du jeu a affecté le spectacle, notamment dimanche avec des conditions météos pourtant nettement meilleures. Dès le trou n°2 (!), les deux joueurs de la dernière partie ont dû attendre 5 bonnes minutes avant de pouvoir taper leur mise en jeu.
Cela n’a pas mis en joie Jon Rahm et Brooks Koekpa, deux joueurs réputés rapides. Parmi les coupables, on citera le meilleur amateur et grand animateur du tournoi Sam Bennett, déjà connu pour ces écarts dans ce domaine, et Patrick Cantlay, qui a un peu agacé son partenaire de jeu Viktor Hovland. Le Norvégien a même renoncé à l’attendre sur le green du n°13… Ambiance.
I fear for Patrick Cantlay after this is over. I’m not sure I’d want to annoy these two! #themasters pic.twitter.com/m2I8AA7CXS
— Nigel Haworth (@nth09) April 9, 2023
Cantlay a été la cible de critiques de nombreux fans sur les réseaux sociaux, mais malheureusement comme sur le PGA Tour, comme partout sur le circuit professionnel, il a pu prendre son temps à chacun de ses coups en toute impunité.
App et télé, le bon ménage
Les fans du Masters en France ont pu suivre comme ils le souhaitaient cette édition sur l’incroyable application du tournoi (à condition d’être abonné à Golf+). Ça tombe bien, les perturbations du programme dues à la météo ont provoqué un petit “couac” du côté des diffuseurs américains qui ont oublié de placer la dernière partie samedi après-midi dans leur planning de retransmission des « featured groups ».
Grâce à MyGroup qui permet de suivre en « quasi direct » tous les coups de tous les joueurs sur l’app et le site du Masters, les plus mordus n’ont rien raté des 6 premiers trous de Rahm-Koepka-Bennett samedi soir, le suspense en moins. La retransmission proposée par ailleurs par les chaînées Canal+ a été riche et complète, notamment le dimanche soir. Moins de publicité, plus de jeu. Le PGA Tour devrait vraiment s’inspirer de ce que propose le Masters pour sa diffusion télé…
Jon Rahm Masters Champions 2023
➡ Tour 4#TheMasters ⛳ pic.twitter.com/mVpOwKyeMJ
— GOLF+ (@GolfCanalPlus) April 9, 2023
LIV vs PGA Tour, on oublie (presque) tout
Présenté comme une sorte de match entre les joueurs du PGA Tour et les dissidents du LIV, ce Masters aura finalement laissé la place au sport. Le duel Rahm-Koepka a un peu tourné court dimanche mais il n’a jamais été vraiment question d’un affrontement entre deux mastodontes de chaque circuit. Le pedigree de ces deux champions méritait bien autre chose. Et c’est tant mieux.
Comme il s’est agi d’un tournoi plein de surprises, il est difficile de jauger de l’état de forme et de compétitivité des « Livistes ». Ils sont quand même 12 sur 18 à avoir franchi le cut. Mais pour la majorité d’entre eux, il va devenir de plus en plus difficile de participer à un majeur. Sauf pour Brooks, Phil Mickelson et Cameron Smith. Le vrai faux match entre les circuits va finir par disparaître… A moins que les instances se décident à réparer le classement mondial ou que les majeurs fassent évoluer leur critère de sélection. Ce qui pourrait également permettre à plus de joueurs du DP World Tour de jouer ces épreuves incontournables.
On reverra Theegala
On l’a dit plus tôt, le golf américain a placé 10 joueurs parmi les 13 premiers du Masters. Impressionnant. Jordan Spieth (5e top 3 en 8 participations !), Scottie Scheffler, Xander Schauffele, Cameron Young ou encore Collin Morikawa étaient attendus et ils n’ont pas déçus.
Les vraies surprises sont venues de Russel Henley (4e) et de Sahith Theegala, brillant 9e pour sa première participation. Sans complexe, le natif d’Orange en Californie, 24 ans, a réussi un dernier tour (67) marqué par un coup d’anthologie à la Tiger Woods ». Le jeune homme n’a pas encore gagné sur le PGA Tour, mais ça ne saurait tarder. Le golf américain tient en lui une nouvelle pépite pleine d’avenir. Une de plus.