A Troon, Romain Langasque nous a accordé une longue interview après sa superbe 3e place au Scottish Open. En confiance et transformé par un changement de caddie, il aborde l’Open britannique sans complexe et avec ambition.
De notre envoyé spécial à Troon, G.B.
GOLF PLANETE : Romain, racontez-nous ce dimanche de feu à North Berwick (64) et ce superbe podium au Scottish Open…
Romain LANGASQUE : C’était la super dernière journée qu’il me fallait ! La semaine dernière à Munich, j’avais un peu tué mon tournoi avec un triple sur le 10 au dernier tour. J’ai dû m’accrocher pour faire 9e. Là, je partais de loin et dans ma tête, une bonne dernière journée pouvait me permettre d’obtenir un top 10. Et ça s’est bien goupillé. Je ne pensais pas que je pouvais faire troisième, même un top 5 semblait inaccessible… Pour moi, c’était loin.
Le fait d’avoir été détaché du résultat jusqu’au bout a été bénéfique. Jusqu’au putt du 18. C’est le seul moment où je me suis senti un peu sous pression car j’aurais pu être en tête au club-house.
Les deux premiers tours, j’ai très bien tapé la balle, et mal putté. Le troisième jour, je jouais moins bien, mais j’ai bien putté. Et ce dimanche, j’ai à la fois été bon dans le grand jeu et sur les greens.
G.P. : A un moment, on a même envisagé la possibilité d’un play-off pour vous. Comment avez-vous vécu cela ?
R.L. : C’était énorme parce qu’à la fin, je donne mon sac à mon caddie, on se dit au revoir… Åberg est -17… Puis il fait deux bogeys. Adam Scott à son tour fait un bogey. Je me retrouve 3e seul. Mon caddie s’était douché, il était en tenue de ville. Donc on a attendu avant de partir (sourire)…
G.P. : C’est un dimanche qui change beaucoup de choses pour vous…
R.L. : C’est comme si j’avais gagné la semaine d’avant ! C’est 26 points mondiaux, 500 points à la Race to Dubai… On sait que ces opportunités-là peuvent déclencher une saison. Je suis très content parce que ce sont vraiment des points très importants.
Mon nouveau caddie m’a donné une grande confiance.
G.P. : Depuis combien de temps avez-vous ces bonnes sensations ?
R.L. : Depuis que j’ai mon nouveau caddie (Brendan McCartain) ! Il m’a apporté beaucoup de confiance, dès la première semaine en mars à Singapour (21e), puis la semaine suivante en Inde (5e). Depuis trois ou quatre mois, je suis aussi débarrassé de mes problèmes au poignet. Aujourd’hui, la vraie différence, c’est que je n’ai pas de point faible. Même quand mon putting n’est pas performant, je sens qu’il est bon.
G.P. : Que vous apporte précisément Brendan sur le sac ?
R.L. : L’expérience bien sûr. Il a 58 ans, il a eu beaucoup de sacs avant, des victoires, un Majeur (Ndlr, avec José Maria Olazábal au Masters en 1999). On me l’avait conseillé, on m’avait dit : “Attention, c’est un top, mais c’est un peu l’opposé de toi”. Très scolaire. Mais au final, il me dit que je lui rappelle Olazábal parce que j’aime jouer au golf, je suis joueur. Et il aime ça aussi.
La vraie différence, c’est ma confiance en lui. Sur la lecture d’un lie par exemple. Les caddies, c’est un “match” entre deux personnes. Et entre nous, ça matche !
G.P. : Pour une semaine importante comme celle de l’Open britannique, il va vous être précieux.
R.L. : Exactement, il connaît tout le monde, il a caddeyé deux fois à Troon sur le British Open. Moi, je n’ai joué ici qu’une seule fois, lors d’un British amateur il y a longtemps. Je ne me souvenais pas de tous les trous. Il a tout pour m’aider ici. J’ai le copilote qui peut m’aider à faire de très belles choses.
J’ai toujours aimé les links, j’aime jouer, manier la balle.
G.P. : Comment jugez-vous le parcours ici à Troon justement ?
R.L. : Il faut éviter les bunkers de fairway. C’est un coup de perdu à chaque fois. Les neuf trous de l’aller sont très jouables, il faut en profiter, faire des birdies? ce que j’ai fait aujourd’hui. Sur les par 4, on tape souvent des fers 4 suivis de 52°. Ce très long par 5 (le 6), je pense qu’il est touchable en deux, mais il faut vraiment mettre un missile au drive.
Les neuf derniers, il y a des “blind shots” (coups en aveugle), c’est plus long, c’est face au vent. Aujourd’hui, j’ai joué le côté cool (rires) !
J’ai été aussi assez étonné de la fermeté des greens. Les roughs sont plus méchants qu’au Scottish Open, mais ils sont “jouables”, on va retrouver la plupart des balles. Mais il faut rester sur le fairway pour pouvoir tenir la balle sur les greens.
L’image de Matthieu sur le PGA Tour, ça m’a aidé.
G.P. : Vous avez très bien tapé la balle aujourd’hui en reconnaissance, aux côtés d’un ancien vainqueur de l’Open, Shane Lowry. Tous les voyants semblent au vert. Avez-vous appris des choses aujourd’hui ?
R.L. : J’ai envie que mon pic de forme soit ici. Bien sûr, ici, on le sait, la météo, les départs peuvent avoir une énorme importance. Je pense que pour l’instant, vu la météo, je m’en sors bien (voir la liste des départs). Je pars jeudi à 11h58 (12h58 en France)… Pour ce qui est de ce que j’ai appris aujourd’hui, je pense que je vais mettre un fer 2 dans le sac.
Sur les trous du retour que je vais jouer demain (mercredi), ça sera un club plus utile, avec le vent de face. Les links, c’est toujours quelque chose qui m’a beaucoup plu. Je me suis bien régalé avec Shane. Il est comme moi, un manieur de balles. On a passé du bon temps ce matin.
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G.P. : Votre rêve de rejoindre le PGA Tour est en bonne voie après votre performance la semaine passée…
R.L. : L’image de Matthieu sur le PGA Tour, ça m’a aidé. En début de saison, je me disais : “Romain, soigne ta blessure et n’oublie pas que Matthieu a obtenu sa carte du PGA Tour sur les trois derniers mois de l’année”. J’étais 40e, 50e. J’étais à une victoire. Donc c’est cool de m’être relancé complètement vers cet objectif, à un moment très important (Ndlr, il est 12e de la Race).
D’être qualifié pour les gros tournois de fin d’année en novembre, Abu Dhabi et la finale à Dubaï, c’est quelque chose d’important. C’est des tournois où tu peux faire un gros bond. Le PGA Tour, c’est la première division. C’est là où on veut tous aller. Je l’ai raté de peu l’année dernière, j’espère aller au bout cette fois.
G.P. : Est-ce que vous vous fixez un objectif précis, ici à Troon ?
R.L. : Dans ma tête, je n’ai pas de complexe. Je me dis “Pourquoi pas moi”. (Il répète). “Pourquoi pas moi !”.
©Andrew Redington / GETTY IMAGES EUROPE / Getty Images via AFP)