Originaire de la Côte d’Azur, comme Victor Dubuisson, Romain Langasque avait été choisi par le Cannois pour représenter ensemble la France à la Coupe du monde 2016 en Australie. Ils se sont encore croisés ce fameux mardi 5 décembre 2023, jour de l’annonce de la retraite de l’ancien n°15 mondial. Témoignages.
Propos recueillis par Lionel VELLA
Victor Dubuisson a donc annoncé la fin de sa carrière. Cette décision vous surprend-elle ?
Oui, tout le monde a été surpris. Je me doutais un peu que Victor n’allait pas aller sur le Challenge Tour. Après, avec la tournure qu’avait pris ses deux dernières années sur le Tour, on pouvait quelque part s’y attendre. Nous, les joueurs, on le voyait beaucoup moins. Il jouait peu. Et quand il jouait, il arrivait tard sur les tournois, ne sortait pas trop de sa chambre. C’était devenu différent par rapport aux grandes années. Je pense vraiment que c’est la vie de golfeur professionnel qui ne lui convenait plus.
Qu’avez-vous pensé de ses propos dans les colonnes de l’Equipe ?
Je connais un peu l’histoire de Victor… Je suis étonné quand il dit qu’il avait une exemption pour 2024 sur le Tour. Alors qu’on sait tous qu’il n’en avait pas. Victor a toujours été dans ce milieu du golf. Il est passé pro très jeune, il a arrêté l’école pour ne faire que du golf. Je pense qu’il a atteint l’objectif qu’il s’était fixé, à savoir mettre sa famille à l’abri. Sa maman et sa sœur. Le golf en lui-même reste, j’en suis persuadé, sa passion. Il aime vraiment ça. Mais la vie des voyages, des hôtels, de la solitude, pas du tout !
J’ai entendu dire qu’il voulait faire des stages en Turquie, en Espagne… S’associer avec un autre pro… C’est quelque chose qui peut fonctionner
Quelle va être désormais sa vie d’homme selon vous ?
Il est assez imprévisible comme garçon. J’ai entendu dire qu’il voulait faire des stages en Turquie, en Espagne… S’associer avec un autre pro… C’est quelque chose qui peut fonctionner. Et puis il a aussi dit que le coaching l’intéressait. J’espère que ce qu’il fera lui plaira, et que ce sera le plus important.
Quand l’avez-vous vu ou parlé avec lui pour la dernière fois ?
Je l’ai croisé hier (mardi 5 décembre) au golf de Mandelieu (06). J’ai déjeuné là-bas. On s’est juste dit bonjour. La dernière fois que j’ai eu une vraie discussion avec lui, c’était à Ras Al-Khaimah, en début d’année. Au mois de janvier. Il a très peu joué ensuite. On l’a très peu vu.
Que retiendrez-vous de Victor Dubuisson, en tant que golfeur professionnel ?
Ses mains en or. Ses coups incroyables. Les premiers souvenirs de lui qui me viennent, c’est la Ryder Cup 2014 quand il est associé à (Graeme) McDowell. Et puis forcément, sa prestation au WGC-Match Play, dans le désert de l’Arizona… Sa deuxième victoire en Turquie (en 2015), qui sort un peu de nulle part. Sur un plan un peu plus personnel, il y a cette Coupe du monde en 2016. Il était alors au pic de sa carrière. Dans le top 50 mondial. On joue -8 tous les deux le dernier tour et on finit deuxièmes. Rien que d’en parler, cela me donne encore des frissons aujourd’hui. Ceci restera forcément un très grand moment golfique pour moi.
Il vous avait choisi pour l’accompagner en Australie…
Exact. D’ailleurs, ça avait fait du bruit puisque c’était Grégory Bourdy qui était n°2 à ce moment-là et il m’avait pourtant choisi.
J’ai passé des moments incroyables, avec des discussions incroyables, des moments assez fous et il y a eu aussi des périodes où je n’avais aucune nouvelle de lui pendant six mois.
Comment était-il dans la vie de tous les jours ?
Victor, c’était assez spécial. J’ai passé des moments incroyables, avec des discussions incroyables, des moments assez fous et il y a eu aussi des périodes où je n’avais aucune nouvelle de lui pendant six mois. Victor, c’est un peu les opposés… Quand il est bien avec vous, c’est quelqu’un de très généreux, qui va être là, qui va vouloir vous aider… C’est quelqu’un qui a la main sur le cœur mais qui n’était pas forcément à sa place sur le circuit, surtout ces dernières années.
Peut-il selon vous nous annoncer son retour dans un ou deux ans ?
Cela me surprendrait. D’autant qu’il avait cette opportunité de se qualifier pour le LIV Golf. Cela me semblait être la meilleure option qui pouvait s’offrir à lui. Quatorze tournois, une garantie d’argent… Et même ça, il ne l’a pas saisi. J’ai donc du mal à imaginer un retour dans le sens où il n’aime vraiment plus ça. Après, on ne sait jamais. Il n’a que 33 ans. Peut-être que dans deux ans, pour ses 35 ans, il se dira : « Ça me manque et c’est ça que je j’aime » Et peut-être qu’il gagnera de nouveau sur le Tour à 37 ans. Mais aujourd’hui, là, maintenant, je dirais non à un retour. Mais ces profils sont tellement imprévisibles que tout est possible. Alors pourquoi pas ?
Photo : SCOTT BARBOUR / GETTY IMAGES ASIAPAC / Getty Images via AFP