Au-delà de la victoire sans appel, et quelque peu humiliante, de l’équipe des Britanniques sur les Continentaux (17-8), la question est surtout de savoir combien parmi les vingt joueurs présents entre vendredi et dimanche à Abu Dhabi seront dans la Team Europe en septembre à Bethpage pour la 45e Ryder Cup de l’histoire.
L.V.
Il y a deux ans, lors de la précédente Team Cup (qui s’appelait d’ailleurs la Hero Cup), six des vingt joueurs convoqués avaient validé quelques mois plus tard leur présence à Rome pour la 44e Ryder Cup brillamment remportée par les Européens (16,5 à 11,5) : Tommy Fleetwood, Shane Lowry, Tyrrell Hatton, Robert MacIntyre, Nicolai Højgaard et Sepp Straka.
Combien seront-ils cette fois à effectuer le périlleux voyage vers Bethpage (New York) et son public d’ores et déjà chauffé à blanc ? Si l’on prend en compte les absences cette semaine à Abu Dhabi de Rory McIlroy, Ludvig Åberg, Viktor Hovland et Jon Rahm, il reste encore huit places à prendre* pour participer à la grande « fête » dans la banlieue de Big Apple.
Ils ont confirmé leur statut d’incontournable
Vainqueur de tous ses matches, dont l’un en simple face à Matthieu Pavon (victoire 3&1) en proposant un jeu de golf d’un niveau rarement atteint dans une Team Cup, Tommy Fleetwood, l’actuel n°9 mondial, obtient dès maintenant son ticket pour Bethpage, et ce même s’il n’occupe pour le moment que la 16e place du ranking européen où seuls les six premiers seront assurés d’être qualifiés au soir du British Masters, le 24 août prochain (les six autres seront issus des six picks du capitaine).
Lui aussi invaincu, même s’il a dû partager le demi-point lors des Foursomes de samedi matin, Tyrrell Hatton apparait comme incontournable dans l’équipe européenne de Ryder Cup. On fait d’ailleurs ici confiance au DP World Tour pour régler son différend avec l’actuel membre du LIV Golf, qui a fait appel des sanctions du Tour européen prononcées contre lui. Et contrairement à un Jon Rahm, qui n’a pas daigné faire le déplacement vers Abu Dhabi, alors qu’il est au départ du Hero Dubaï Desert Classic la semaine prochaine, sa présence ô combien remarquée dans cette Team Cup prouve que l’Anglais place la Ryder Cup au-dessus de toutes les polémiques.
Ils ont marqué des points…
Incontestablement l’homme « fort » des Continentaux, vainqueur de ses trois matches en doubles dans lesquels il a endossé le costume de leader, Matthieu Pavon a fait le job comme l’on dit pour épater Luke Donald et tout son staff. Paul McGinley, ancien capitaine vainqueur en Ryder Cup (en 2014) et très « écouté » dans le vestiaire européen, n’a pas été avare en compliments quand il a évoqué à plusieurs reprises le Français, notamment sur SkySports.
Ce n’est pas parce que l’on gagne 4 matches que l’on est automatiquement sélectionné en Ryder Cup. Il faut bien jouer en Majeurs, il faut gagner des tournois, être régulier toute l’année.
Matthieu Pavon au micro de Canal+
Malgré une défaite en simple dans la partie 1 (un gage de confiance assurément) face à l’ogre Fleetwood, le Bordelais est conscient d’avoir fait un pas important dans cette quête d’une place en Ryder Cup.
« C’est un signe fort (être en partie 1) mais il y a une grande saison devant nous, prévient Matthieu Pavon au micro de Canal+ à l’issue de son match perdu en simple. Ce n’est pas parce que l’on gagne 4 matches que l’on est automatiquement sélectionné en Ryder Cup. Il faut bien jouer en Majeurs, il faut gagner des tournois, être régulier toute l’année. Ce sera le plus important. Il faudra finir ce marathon sur un gros sprint et peut-être qu’on aura une chance de faire partie de cette élite. »
Tout comme Fleetwood et Hatton, Paul Waring est sorti de cette Team Cup 2025 avec un sans-faute : trois victoires et un nul. Certes, l’Anglais, 40 ans le 2 février, est beaucoup moins médiatique que ses deux compatriotes mais le bonhomme a clairement changé de statut depuis le début du mois de novembre. Depuis sa très belle victoire à l’Abu Dhabi HSBC Championship, premier des deux playoffs de fin de saison sur le DPWT. Un succès qui lui a permis dans la foulée de décrocher l’un des dix spots en jeu pour évoluer sur le PGA Tour en 2025 (5e de la Race 2024). De bonnes performances sur le plus relevé des circuits pourraient, qui sait, lui permettre de créer la « grosse surprise » de l’année. Il occupe actuellement la 5e place du ranking européen et est donc pour le moment « qualifié ».
On a gagné tous nos matches, on n’a jamais été down… Ils savent que notre relation entre nous est très forte.
Romain Langasque au micro de Canal+
Juste avant le début de la Team Cup, il nous avait déclaré avoir aujourd’hui 20 % de chances d’être à la prochaine Ryder Cup. Qu’en est-il aujourd’hui pour Romain Langasque après avoir remporté trois de ses quatre matches (tous en doubles avec Matthieu Pavon) ? Quelques minutes après sa lourde défaite (5&4) en simple face à Laurie Canter, l’Azuréen restait lucide son sur cas.
« Si jamais Matthieu se qualifie, et moi aussi, ils savent (le staff technique), souffle-t-il doucement au micro de Canal+. On a gagné tous nos matches, on n’a jamais été down… Ils savent que notre relation entre nous est très forte. Si je continue de développer mon niveau de jeu depuis mars-avril de l’an passé, je pense vraiment avoir une chance. Mais je pars de loin. Il y a encore du boulot. Une victoire en Majeur, et tout peut jouer en ma faveur. Je le sais, j’en suis conscient. »
Justin Rose, un cas à part…
Capitaine des Britanniques, Justin Rose, affiche l’un des plus mauvais ratios de son équipe : quatre matches, deux défaites. A chaque fois face au duo Pavon-Langasque. Mais l’aura de l’Anglais, 44 ans, demeure intacte. Surtout vis-à-vis de son ami, Luke Donald. On voit mal comment ce dernier pourrait ainsi se priver d’un garçon quatre fois vainqueur en Ryder Cup en six participations tout en ayant ramené 15,5 points à l’Europe entre 2008 et 2023.
Ils ont déçu…
Très certainement perturbé par le forfait de dernière minute de son frère jumeau, Nicolai, malade, Rasmus Højgaard est clairement la très grosse déception de cette Team Cup. Le Danois, pourtant 2e de la Race 2024 et « qualifié » pour le PGA Tour 2025, est apparu complètement hors sujet, aussi bien en doubles (trois défaites avec le jeune Rasmus Neergard-Petersen, arrivé tout droit du Challenge Tour) qu’en simple où il a eu néanmoins le mérite d’éviter le zéro pointé en accrochant le demi-point du nul face à Aaron Rai. Avec 706,53 points, il est toutefois confortablement installé à la 2e place du Ranking européen (à un peu moins de 100 points de McIlroy, solide leader mais avec 120 points d’avance sur le 3e, Tyrrell Hatton). A lui de renverser la tendance sur le PGA Tour. Il a six mois pour cela.
Eux aussi potentiellement dans l’antichambre, Matt Wallace, aux portes de la Ryder 2018 au Golf National, et Aaron Rai n’ont pas convaincu à Abu Dhabi. Le premier a perdu deux de ses matches (dont le simple face à Antoine Rozner sur un putt manqué d’un peu plus d’un mètre au 18) et n’a ramené au final qu’un point et demi. Ses difficultés en double, notamment au putting, ont interpellé. Il est à ce titre le représentant de la Team GB&I à afficher le moins bon solde de points : 1,5 ! A partir de là, sa 4e place au ranking européen ne lui assure pas forcément un laisser-passer pour New York. Quant au second, pourtant 22e joueur mondial et récent vainqueur sur le PGA Tour (en août au Wyndham Championship), il n’a pas offert les meilleures garanties (sur son putting et son jeu de fer notamment), étant même rattrapé lui aussi sur le 18 par un pourtant fantomatique Ramus Højgaard.
Tom McKibbin, LIV or not LIV ?
Vainqueur dans ses trois matches en Fourballs puis en Foursomes, le Nord-Irlandais, 22 ans, s’est incliné 1 down en simple face à Matteo Manassero, l’un des maillons faibles des Continentaux. Promu sur le PGA Tour, son avenir s’annonce radieux, d’autant qu’il a pour atout de compter comme mentor un certain Rory McIlroy… Ils sont tous les deux membres à l’Holywood Golf Club, près de Belfast. Mais le lauréat de l’European Open en 2023 est, parait-il, devenu la cible de Jon Rahm et de son équipe sur le LIV Golf, Légion XIII. Un départ sur le Tour dissident pourrait sceller son destin en Ryder Cup. Osera-t-il franchir le pas ?
*Robert MacIntyre, 14e mondial, Shane Lowry, 27e mondial, voire Sepp Straka, 38e mondial, peuvent eux aussi faire partie des quasi partants pour Bethpage. Ils ont d’ailleurs été tous les trois de la victoire à Rome.
Photo : Kate McShane / GETTY IMAGES EUROPE / Getty Images via AFP