Le cas Rory : la course à la distance est un jeu dangereux
Une chronique de Ivan Morris
Nous devons accorder tout notre crédit à Rory McIlroy. Car il est honnête !
Il ne joue pas aux mendiants stupides avec les journalistes en crachant du fumier. Il partage patiemment ses pensées les plus intimes après chaque tour de tournoi, qu’il ait été bon ou mauvais. Sa franchise permet aux analystes invétérés du swing, comme moi, de tenter de comprendre ce qui se passe. On constate aujourd’hui que beaucoup de golfeurs se sont autodétruits sans pouvoir revenir en arrière en se lançant dans une course folle à la distance. Un objectif qui est un jeu dangereux.
Une grande distance ne fera pas de vous un meilleur golfeur
Quand Rory a déclaré qu’il avait perdu en précision, en contrôle et en régularité en recherchant la vitesse dans le but d’imiter Bryson DeChambeau, il a admis une vérité forte. Comment a-t-il pu être si naïf en se fixant cet objectif ? Facile, me direz-vous : tous les golfeurs de haut niveau n’ont-ils pas été poussé un jour à aller plus loin, à frapper encore plus fort la balle, à essayer ainsi de scorer encore plus bas ? Partant du principe que plus vite on est près du green, plus vite on a la chance de scorer bas.
Mais une constatation demeure : il n’y a aucune garantie qu’une plus grande distance fera de vous un meilleur joueur ! Il existe d’autres moyens beaucoup plus fiables de le devenir. Comme la pratique systématique du wedge au practice chez Dustin Johnson ou le jeu de fer machinal travaillé comme un forcené par Collin Morikawa.
Le golf demeure toujours un travail en chantier (à tous les niveaux) qui contient tellement d’aspects différents. C’est pourquoi c’est un jeu si alléchant !
Avant de parler de ses drives, il convient de rappeler que DeChambeau, lui-même, a commencé en mettant au point un swing plus rythmé avec ses fers. Il ne fait plus pratiquement de fautes avec et joue beaucoup mieux à cause de cela.
3 ans pour apprendre, 3 ans pour désapprendre et alors commencer !
Le problème pour Rory maintenant, avec le Masters qui arrive, est de savoir comment réparer les dégâts et comment revenir rapidement là où son jeu de golf doit être.
C’est Walter Hagen qui disait : «Il faut six ans pour faire un golfeur. Trois ans pour apprendre le jeu, puis encore trois ans pour désapprendre tout ce que vous avez appris au cours des trois premières années. Vous serez un golfeur lorsque vous arrivez à ce stade, mais il est plus probable qu’alors vous ne fassiez que commencer ! ».
Sir Walter n’avait pas tort. Rory est de retour au stade du désapprentissage et c’est loin d’être facile. Lorsque les résultats ne donnent pas une image fidèle de la performance, le golf est difficile. En même temps, si le jeu ne vous conduit pas à vous distraire de temps en temps, vous ne serez jamais un grand joueur. (Lee Trevino a dit ça!)
La compétition doit consister à faire ressortir le meilleur de vous même quand le moment est venu. Peu de joueurs peuvent le faire et personne ne peut le faire simplement à volonté. Il n’y a rien de tel que la tension d’un tournoi sur les derniers trous quand tout est en jeu.
Les humains ne sont pas des machines et le swing de golf idéal n’existe pas
Cela change les swings, selon le maitre et coach Michael Hebron : « Le swing de golf n’existe pas dans un livre, un magazine ou selon les mots de quelqu’un. Le swing est un mouvement avec une durée de vie de moins de deux secondes ; les swing de golf n’existent pas avant d’être créés par des golfeurs et, comme les êtres humains, chaque swing est unique, tout comme chaque être humain est unique ».
Les humains ne sont pas des machines construites pour suivre un plan exact qui se répèterait exactement à chaque fois. Les golfeurs évoluent dans des circonstances différentes et en constante évolution.
Rory entre doute et confusion en phase de « désapprentissage »
Rory est dans une situation qu’il n’a jamais connue auparavant : le doute de soi et la confusion remplissent son quotidien. Il doit faire un «désapprentissage» : pas facile mais pas impossible non plus. Il peut s’en sortir si tout va bien. On lui souhaite.