Après avoir abordé la question des « déserts golfiques » puis des « zones à saturation », Golf Planète s’est penché sur les régions à fort potentiel.
Quand on regarde les cartes proposées par la Fédération, on peut s’imaginer que le tissu golfique français est déjà bien fourni avec un bon maillage et qu’il n’existe pas véritablement de zones « maudites » Et pourtant…
L’exemple du Bassin d’Arcachon
Parmi certains exemples qu’on pourrait choisir, on peut ainsi citer celui du Bassin d’Arcachon près de Bordeaux.
Bordeaux, grande métropole régionale, compte une dizaine de parcours, avec quelques réalisations récentes comme le 18 trous de Villenave d’Ornon dans l’agglomération girondine, qui fut longtemps d’ailleurs un vrai serpent de mer avant de devenir réalité… Comme quoi il n’est jamais trop tard pour bien faire, voire pour rattraper des erreurs qui paraissaient insurmontables…
Au total, une offre tout à fait suffisante et satisfaisante pour la population locale. Si on s’éloigne un petit peu, dans un rayon de 50kms, la situation est beaucoup plus contrastée. L’exemple du Bassin d’Arcachon est éclairant. Cette perle du Sud-Ouest de la France, qui attire chaque année plus d’1,5 million de visiteurs seulement sur la fameuse Dune du Pilat, ne dispose comme infrastructures golfiques que de deux 18 trous – Arcachon l’historique et Gujan-Mestras (chaîne Blue Green) à quelques kilomètres de là. Cette lagune, pour ceux qui ne connaissent pas l’endroit – en forme de croissant, ne repose donc que sur un seul pied.
Pourtant, les projets de création de parcours de l’autre côté du Bassin, en particulier sur la presqu’île du Cap Ferret, ont existé, depuis 40 ans, en particulier un magnifique 18 trous imaginé par Robert Trent Jones Sr lui même. Les écologistes en ont décidé autrement…
À Soulac, plus au nord en remontant la côte atlantique, un autre projet de 18 trous ne vit jamais le jour non plus.
Pourtant, tout militait pour leur développement : foncier disponible, bassin de population en particulier. Tout sauf deux choses : la première, la Loi Littoral de 1986, qui interdit toute construction – et un parcours de golf est assimilé à une « construction » – à moins de 100 m du trait de côte, ce qui supprimait de facto la possibilité de créer un links comme en Écosse par exemple et ensuite la volonté politique indispensable sans laquelle rien ne peut aboutir. Une situation qui a sonné le glas des ambitions de certains qui rêvaient à faire de la côte aquitaine une Californie à la française ou, plus près de nous, un petit frère de ce qu’on voit chez nos voisins écossais ou irlandais.
Sans vouloir aller jusque là, on aurait pu imaginer sans rompre les équilibres naturels, d’avoir entre la Pointe du Verdon au nord et le massif landais au sud, deux golfs supplémentaires mieux répartis sur le territoire au lieu de deux situés dans un même endroit, Lacanau pour ne pas le nommer.
Mais, on l’a déjà vu dans nos précédentes éditions, rien n’est simple en la matière. Et la région Nouvelle Aquitaine n’est qu’un exemple parmi d’autres.
Conclusion : il ne suffit pas de disposer du foncier, d’un décor naturel fantastique, des capacités d’aménagement, d’un ou de plusieurs investisseurs et de la population golfique susceptible d’adhérer pour porter un projet à son terme.
16 nouveaux projets seraient en cours. Les 112 projets en statut « initié » ou « avancé » sont majoritairement concentrés dans le sud de la France.
Sur l’ensemble, 29 concernent des golfs déjà existants, et 83 (+12) sont des créations de nouveaux golfs.
Source Ffgolf
Le problème n’est pas forcément financier
Simon Glinec (Ffgolf) nous a donné son avis sur la question.
GGP : Peut-on être optimiste et dire que le golf en France a encore un potentiel de croissance et de développement ?
Simon Glinec : Bien sûr ! On a pu voir que le golf avait bénéficié de la Covid et que de nombreux nouveaux joueurs ont pu découvrir ce sport.
GP : comment la FFG repère les endroits dignes d’intérêt? Les investisseurs vous alertent-ils sur leurs projets, avez vous aussi des contacts avec les responsables politiques locaux?
SG : Nous avons un algorithme qui a fait ressortir les villes et communautés d’agglomération ayant un potentiel intéressant pour l’implantation de petites structures. Nous communiquons auprès de ces mairies et argumentons en faveur du golf et continuons, via par exemple notre présence au Salon des maires. Le problème n’est pas forcément financier : de nombreuses aides, notamment via le Projet Sportif Federal (PSF) de l’Agence nationale du sport permettent de couvrir jusqu’à 80% du cout total.
Pour les porteurs privés, ce sont plutôt eux qui viennent vers nous.
Nous avons une veille très active qui nous permet de contacter les porteurs de projet encore inconnus de nos services, le but étant d’éviter des erreurs qui peuvent être critiques et rédhibitoires sur la viabilité du projet, et d’accompagner et encourager ces porteurs auprès de leur mairie, citoyens..etc »
Michel Niedbala : à Roissy, j’ai entremêlé judicieusement un sport peu connu avec des activités déjà pratiquées et j’ai rendu le lieu encore plus attractif
Nous avons également demandé à deux autres personnalités qui sont impliquées dans le nouveau golf de Roissy à l’est de Paris : l’architecte Michel Njedbala, concepteur de ce golf et auteur du livre « L’Architecture de Golf est l’Art d’Aimer la Nature » * et Swann Gueydan, ambassadeur de la chaîne U Golf en France, comment une telle réalisation a pu voir le jour et si elle peut servir de modèle ailleurs dans l’hexagone.
GP : Qu’aviez vous en tête, quels ont été les principes directeurs qui vous ont animé pour que le parcours que vous avez imaginé à Roissy à l’est de Paris soit conforme aux attentes des investisseurs mais aussi de l’ensemble des personnes impliquées dans ce projet ?
Michel Niedbala :Il est souvent difficile à un maître d’ouvrage d’imaginer une structure de golf… Dans la très grande majorité des cas, ce maître d’ouvrage n’a qu’une connaissance empirique de ce qui « serait nécessaire » pour répondre au marché golfique en général…
Un tel équipement sportif n’est pas uniquement un terrain de jeu mais également un lieu de liens sociaux et d’activités récréatives nouvelles pour l’essentiel des projets.
Pour ma part, le rôle de l’architecte de golf s’évertue, au delà du dessin du parcours de golf, à apporter toute la dimension de ses expériences et plus particulièrement ses intuitions et visions sur l’avenir de ce sport.
En 2008, lors du concours pour le projet du Golf de Roissy-en-France, sur treize groupements de candidats, mon offre a reçue un accueil enthousiaste du jury avec 98 points sur 100. La raison tient principalement à ce que j’ai exprimé ci-avant. Dans ce projet public, la collectivité souhaitait protéger une zone verte (contre la pression immobilière), et maintenir les activités plus ou moins organisées dans ce lieu dénommé « La Vallée Verte », comme les cheminements publics, les aires de pique-nique, etc…
Mon ambition a été de rendre ce lieu plus attractif et plus intéressant, pour entremêler judicieusement le golf, ce sport peu connu de la population locale, aux activités déjà pratiquées. La stratégie a été de développer des actions vers toutes les strates sociales et économiques de la population en offrant des équipements qui procurent du plaisir avant tout, qui facilitent le jeu et le rendent ludique.
Pas moins de vingt points de cette stratégie contribuent déjà au succès de ce golf public. Je développe ces points et bien d’autres sujets à propos du golf de Roissy, dans mon ouvrage : « L’Architecture de Golf est l’Art d’Aimer la Nature ».
Il faut beaucoup de temps et de patience pour construire un golf
GP : Entre l’élaboration du futur parcours et du complexe en général, combien de temps a t-il fallu pour arriver à vos fins ?
M.N : Beaucoup de temps et beaucoup de patience… En 2008, avec M. André Toulouse, le maire et l’équipe de la mairie de Roissy « nous partîmes en chantant… » nous donnant de trois à quatre années pour aboutir à un Permis d’Aménager… Ce chemin fût beaucoup, beaucoup plus long… parsemé d’obstacles, d’incompréhensions, d’oppositions, etc… qui, au fur à mesure, nous ont donné l’impression d’être assis dans un manège parcourant des montagnes russes.
Pour rendre ce projet possible, André Toulouse prit la décision de créer une DUP (Déclaration d’Utilité Publique), une contrainte forte pour ce dossier qui se devait d’être vertueux et au-delà. Cette contrainte, toutes les parties prenantes la transformèrent en un atout qui transforma l’essai pour paraphraser un autre grand sport. Finalement, 2020 arriva et l’ouverture du Golf International de Roissy fût une réalité… J’avais pris entre temps douze ans de plus…
GP : Quels ont été les obstacles les plus difficiles à résoudre : financier, étude d’impact, qualité du sol… ?
M.N : J’ai évoqué la DUP (Déclaration d’Utilité Publique) qui, je pense, est la seule obtenue en France par un golf…
Nous pensions que le voyage après le début des travaux préparatoires en 2017, par la création de la retenue des eaux pluviales prévue pour l’arrosage golf, serait « un long fleuve tranquille »… Que nenni…
Un difficulté que nous avions pourtant intégrée dans le projet se révéla beaucoup plus problématique en 2018… Les fouilles archéologiques préventives que nous avions anticipées devaient se dérouler sur une dizaine d’hectares tout au plus et dans des zones hors jeu de golf. Notre surprise fût grande quand nous apprîmes que celles-ci allaient s’étendre sur 35 hectares ! Nous nous sommes retrouvés dans un contexte qui pouvait prolonger le délai dans des proportions quasi inconnues. Mon expérience m’apporta la solution et je salue l’Administration qui a été très constructive dans son approche sur ce sujet. J’ai remanié le projet de telle sorte que nous protégions par des remblais les zones sensibles archéologiques et nous évitions toute excavation dans ces lieux. Ce fût un succès !
GP : De quoi êtes vous le plus fier à Roissy ?
M.N : D’avoir rendu simples les choses compliquées.
GP : Pensez vous qu’aujourd’hui avec toutes les contraintes – et elles sont nombreuses – et les crises successives qu’on connaît en France et en Europe, un tel projet puisse se développer ailleurs ?
M.N : Chaque contexte requiert une réponse adaptée. Je suis opposé à voir trop souvent se répéter une « formule » sous le prétexte qu’elle a du succès à tel endroit. La pérennité du golf ne s’inscrit pas dans ce genre de démarche stéréotypée. L’originalité est mon credo, c’est ce qui fait le succès.
Le golf est une démarche plus large de préservation d’espaces naturels
GP : Connaissez vous en France des lieux d’implantation possibles, au moins en théorie, qui pourraient accueillir un nouveau parcours ?
M.N : Bien entendu, certaines régions seront plus porteuses de projets, par la densité de leur population, par leur attractivité touristique et – ou économique. L’assise foncière joue également un rôle prépondérant. Il est compréhensible que la qualité des lieux, la qualité des sols, la qualité de l’environnement et de son paysage – et la liste n’est pas exhaustive – sont des atouts qui impactent directement la construction et ensuite l’exploitation.
Les premiers parcours de golf sont nés sur des terrains sableux… l’idéal… Mais ensuite, le besoin d’avoir un golf à proximité a poussé des promoteurs a insérer, quelquefois avec douleur, des parcours dans des lieux peu propices. Le coût de construction est devenu plus élevé, pour permettre de créer un couvert végétal de qualité offert aux joueurs-clients.
Par trop souvent, le budget a été trop timoré et le résultat ne s’est pas fait attendre, par une réduction de la qualité proposée qui, au final, a abouti pratiquement à la disparition du golf pour certains. L’implantation d’un parcours de golf ne doit pas simplement répondre à un besoin local de joueurs mais à une démarche plus large de préservation d’espaces naturels, et ce, d’une manière économique.
Le golf est une structure qui vit avec toutes les composantes de la population, qui développe des emplois, qui anime les lieux, qui crée des liens sociaux, qui dynamise l’économie, qui valorise l’image de la commune, etc…
Ces aspects sont tout aussi importants que la satisfaction de quelques uns. S’inscrire dans le développement durable demande ce genre de réflexion pour produire une véritable adhésion de la population initialement au projet, et à terme, à la pratique du golf. Le golf est un outil pour bâtir des vies saines et équilibrées.
* En vente en contactant Golf Optimum par email : contact@golfoptimum.fr
Swann Gueydan (Ugolf) : Convaincre la population et faire face aux problèmes administratifs et environnementaux
GP : Peut -on dire que la création du golf de Roissy a répondu à une vraie attente ?
Swann Gueydan : L’offre golfique en IDF est très complète, tant par l’occupation géographique que par les gammes de golf. Pour autant Le Golf international de Roissy a su trouver sa place dans ce contexte car il constitue une véritable opportunité pour les golfeurs parisiens mais aussi pour tous les touristes d’affaires qui résident dans le parc hôtelier voisin.
GP : Quels étaient précisément les atouts du territoire qui a été ciblé ?
S.G :Le Golf international de Roissy dispose de nombreux atouts :
- Proximité immédiate de Paris : à 15 minutes de la porte de la Chapelle
- Facilité d’accès autoroute A1/Gare TGV/aéroport international
- Proximité de l’aéroport Charles de Gaulle
- Parc hôtelier majeur
- Bassin de population de près de 4 millions d’habitants à moins de 30 minutes de voiture
- Volonté politique qui a permis de franchir tous les obstacles
GP : Quels ont été les obstacles les plus difficiles à surmonter ?
S.G : Comme pour tout nouveau projet golfique, il faut dans un premier temps convaincre la population locale de l’intérêt majeur d’un tel équipement, c’est parfois long mais les arguments sont implacables…Les principales difficultés sont d’ordre administratif et environnemental mais la aussi il est normal de lever l’ensemble des questions que soulève la création d’un golf pour en faire un projet qui emporte l’adhésion de l’ensemble des acteurs.
GP : Les premiers mois d’exploitation malgré les crises qu’on connaît ont ils été encourageants et sont-ils conformes à vos attentes ?
S.G :Le golf de international de Roissy cogéré par PGA France et UGOLF filiale du Groupe Duval, connait une fréquentation globale soutenue conforme à nos attentes bien que nous ayons dû refermer le golf 40 jours après son ouverture au public en raison de la situation sanitaire du moment.
Ce fut pour un coup dur après de longs mois de travail et de préparation de devoir fermer les portes fin octobre 2020
GP : à votre avis, existe t-il en Ile de France des territoires où on peut encore créer de nouveaux parcours et cela serait-il souhaitable par rapport aux golfs déjà existants et qui ne sont pas tous florissants ?
S.G : Il existe encore des « déserts golfiques » en France mais qui le sont sans doute pour de bonne raison, la première étant la réalité du bassin de population.
La priorité aujourd’hui, à mon sens, consiste à créer de nouveaux golfeurs avant de nouveaux golfs.
GP : La proximité d’autres parcours est-elle pour vous un handicap ou au contraire peut favoriser des partenariats?
S.G : La densité de golfs sur un secteur est à mon sens une opportunité, d’abord parce que cela permet de constituer une destination golfique telle que nous pouvons le voir par exemple au Pays Basque. Mais aussi parce qu’une offre large oblige aussi chaque golf à progresser en permanence, à réinventer, à innover, à investir pour rester concurrentiel , se démarquer et poursuivre son développement.