Chaque année, en toute fin du British Open, ses mains sont vues par des millions de téléspectateurs. Garry Harvey grave le nom du vainqueur sur la fameuse Claret Jug avec une dextérité et une rapidité confondantes. Un jour de 1972 c’est même son propre nom qu’il eut à graver sur la coupe du vainqueur du British Boy’s.
Par Sébastien Brochu
Il inscrit d’autres noms que le sien dans l’Histoire. Ne pas voir ses mains à la télévision gâcherait un peu la fête. Chacun scrute l’erreur fatale qui viendrait entacher sa légende. Mais non, à chaque fois ses doigts d’expert font glisser ses burins sur la plaque en métal avec la même assurance d’un pro pour un tap-in.
Le vainqueur gravé en quelques minutes
Cette année encore, Garry Harvey, 68 ans, n’a commis aucune faute d’orthographe et a rendu dans les temps, la fameuse Claret Jug nouvellement scarifiée dans sa chair en métal. Les lettres C A M E R O N S M I T H ont été gravées en quelques minutes afin que l’Australien puisse brandir en direct et en mondovision le trophée adoubé par son nom.
Ce ne fut pas aussi “big easy” qu’en 2012, quand Ernie Els remporta pour la seconde fois le tournoi… Mais c’est tout comme : un nom court et facile à orthographier. L’idéal pour ce bijoutier écossais qui ne fait que perpétuer la tradition initiée par son père Alex, aujourd’hui décédé.
Une tâche dévolue avant au vainqueur
Auparavant, le vainqueur du tournoi devait s’occuper lui-même d’inscrire son nom. Seulement voilà : en 1967, l’Argentin Roberto de Vicenzo, qui n’est pas à une étourderie près avant son erreur fatale de carte au Masters, rend la coupe sans son nom… Un an plus tard, Gary (avec un r) Player n’oublie pas de le faire graver, mais avec un corps de texte beaucoup trop grand ! Shocking.
Le R&A prend en main la gravure
C’en est trop pour le Royal & Ancient qui décide de s’occuper de cette mission en désignant un agent préposé. En 1973, Alex Harvey prend définitivement en main les affaires jusqu’à sa retraite, survenue en 2005. Sûr de lui, il avoue avoir eu quelques sueurs froides en 1989, après la victoire de Mark Calcavecchia (avec 4 c), à la consonance trop latine…
Un passé de golfeur professionnel
Son fils Garry (avec deux r) devient à 14 ans son apprenti et manie déjà la pointe sèche avec dextérité tout comme les clubs de golf… Dès son adolescence, il figure parmi les plus grands espoirs écossais, s’imposant même au British Boy’s 1972. A cette occasion – accomplissement unique au monde – il grave son propre nom sur le trophée !
A Perthshire native, Garry is a very accomplished golfer and was victorious in the Boys Amateur in 1972 @MoortownGC He remains the only winner to engrave his own name on the trophy! #golf #golfhistory #sportingheritage #engraving #silver pic.twitter.com/ndggrb3YQk
— R&A World Golf Museum (@WorldGolfMuseum) November 24, 2022
Lancé dans une carrière professionnelle, il tente de s’imposer sur le circuit européen, obtenant comme meilleur résultat une 15e place à l’Open de France en 1980. L’année précédente, il participait à son seul Open, chérissant l’idée de voir son papa graver son propre nom. Le miracle n’a pas eu lieu : il finit très loin, à la 139e place…
Une seule victoire à la clé
Sans sponsor et de plus en plus présent à la bijouterie familiale, l’expérience professionnelle tourne court non sans avoir remporté le Kenya Open 1985, alors épreuve du Safari Tour, succédant sept ans plus tard à Seve Ballesteros (avec deux l), autre tourment de son père.
Très attaché à The Open
Graveur officiel du R&A depuis 2005, Garry Harvey tient une bijouterie à Dunfermline, à une heure de route environ de Saint Andrews. Expert reconnu, il opère dans de nombreuses compétitions et immortalise d’autres lauréats comme ceux des concours agricoles du pays.
Mais il reste bien sûr très attaché à l’Open à l’issue duquel il doit aussi graver rapidement sur des médailles, les noms des trois meilleurs amateurs. Il lui reste toujours cette petite appréhension de devoir conjuguer avec un “mauvais” vainqueur, celui dont le nom compliqué est à rallonge.
Parmi les meilleurs joueurs du monde, un certain Christiaan (avec 2 a) Bezuidenhout (encore moins facile à prononcer) est le portrait littéral tout trouvé !
©DR/R&A