Et si la pandémie du Covid avait généré une nouvelle folie du golf ?
C’est ce que laissent entendre des chiffres record qui viennent d’être publiés par la National Golf Foundation et qui prouvent que 101 millions de personnes ont joué au golf l’an dernier dans le monde (dont 25 millions aux USA auxquels il faut y ajouter 14 millions qui ont tapé des balles au practice ou dans des lieux comme Topgolf).
Cela représente aux États-Unis une augmentation de 20% par rapport à 2019, il est vrai marqué par le Covid et une baisse de 42% de fréquentation. En un an, l’augmentation de parcours joués est de 11,3% (soit plus de 50 millions). Les états les plus dynamiques ont été le Texas (+39%), la Floride (+37%) et l’Arizona (+31%). À noter que le pourcentage de jeunes golfeurs de 6 à 17 ans a augmenté de 20% ( soit 500 000 kids !). Le chiffre d’affaires des proshops a même atteint 389 millions de dollars en juillet !
Au Royaume-Uni, selon l’agence BRS, le nombre de parcours joués par les 705 000 membres de clubs, entre aout 2020 et aout 2021, a atteint 15,3 millions d’unités (soit + 938 000). Un légère baisse estivale s’explique par l’Euro de foot qui fait rester les fans chez eux, la mauvaise météo et la réouverture des restaurants et des bars… Toutefois, des chiffres encore très haut par rapport à la période pré-pandémie.
En Australie, l’après-pandémie a montré que 230 000 adultes s’étaient mis (ou remis) à jouer augolf et que le nombre de parcours joués avaient augmenté de 12%.
Un phénomène mondial qui met en avant le besoin de retrouver un sport de plein air que l’on peut jouer avec des amis sans risque sanitaire.
Quant aux marques, les affaires vont bon train. Callaway a annoncé une augmentation du chiffre d’affaires de 91% au deuxième trimestre 2021, Acushnet a lui annoncé une augmentation des ventes de ses clubs de golf de 111% avec un doublement du CA et Taylor Made a été vendu à une société coréenne pour 1,9 milliards de dollars.
Qu’en est-t-il chez nous en France ?
Nous avons posé la question à Christophe Muniesa directeur général de la Ffgolf ainsi qu’à Laurent Boissonnas, président du GEGF (Groupement des Entrepreneurs de Golf Français), premier syndicat professionnel regroupant les propriétaires et exploitants de golf. http://Groupement des Entrepreneurs de Golf Français (gegf.eu)
Christophe Muniesa : nous allons battre notre record en nombre de licenciés !
Je peux confirmer que la tendance est excellente pour le développement du golf en France.
À la fin de l’année 2021, la ffgolf battra son record en termes de nombres de licenciés. Le précédent record, atteint à la fin de l’année 2012, était de 422000 licenciés. Nous allons dépasser les 430000 licenciés à la fin de 2021. Ce taux représente une croissance de près de 8% en comparaison à 2020 et d’un peu plus de 4% en comparaison à 2019 qui était déjà une très bonne année.
Bien évidemment le mesure de la pratique licenciée n’est pas l’alpha & l’omega, mais ça permet quand même d’apprécier la tendance.
Un afflux massif de nouveaux joueurs
Au-delà des chiffres globaux, l’autre bonne nouvelle, c’est l’afflux massif de nouveaux golfeurs. Nous enregistrerons en 2021, plus de 50 000 nouveaux licenciés, soit plus de 10% du chiffre total. Cette dynamique n’avait pas été observée depuis la fin des années 80, mais à l’époque on créait près de 30 parcours par an, ce qui n’est plus du tout le cas aujourd’hui. De fait, le nombre de parcours stagne, aujourd’hui.
Cette forte croissance trouve son origine dans plusieurs éléments de tendance. Tout d’abord, avant la crise de 2020/2021, la dynamique était déjà à la reprise. Nous enregistrions une progression, certes plus modeste, depuis l’année 2016. Le plan des « 100 petits-équipements » qui a contribué à créer plus de 80 000 nouveaux golfeurs entre 2008 et 2018 a joué un rôle central dans l’accueil de ces nouveaux adeptes de la petite balle blanche. L’accueil de la Ryder Cup a mis un coup de projecteur sur notre sport et a permis de catalyser sur ce nouvel attrait d’une frange plus importante de la population française pour le golf. Enfin, les clubs ont mené de vastes campagnes d’opérations « portes ouvertes », le plus souvent gratuites, dans tous les territoires, qu’ils soient urbains ou ruraux.
Les questions sont simples
Aujourd’hui, on s’aperçoit grâce aux études que nous conduisons régulièrement (Union Sports & Cycles, Sports Marketing Surveys, EY….) pour mesurer le nombre de joueurs et évaluer les typologies de pratiques tout comme les motivations des joueurs, que le levier le plus important du développement, c’est l’offre de pratique elle-même. Les questions que toute personne attirée par le golf se pose, sont assez simples : Où vais-je pouvoir jouer ? A quel prix ? Quel va être le « bénéfice » de cette pratique pour moi en termes de plaisir ou encore de bien-être ? Est-ce que je vais être encadré/accompagné par un enseignant ? Et, est-ce qu’on va « s’occuper » de moi pour que mon expérience soit agréable (notion de service) ?
Une croissance durable
Le fait que les clubs répondent présent dans l’ensemble de ces dimensions, nous fait clairement envisager une croissante durable. Nous croyons que ce renouveau de notre discipline fait écho à une envie de nature et de pratique sportive conviviale pour de nombreux français.
Ce désir dont l’année 2021 a été le révélateur est très porteur pour l’avenir du golf tricolore.
Laurent Boissonnas : la famille du golf est restée unie pendant la crise
et aujourd’hui, les signes d’espoir sont là !
La filière golf n’a pas échappé à la crise de la Covid 19. En conséquence de 3 mois de fermeture administrative totale, de 2 mois et demi de fermeture supplémentaire des restaurants et des restrictions de circulation post confinement, les entreprises de golf – quel que soit leur mode de gestion commerciales et associatives – ont perdu en moyenne en 2020 19% de chiffre d’affaires au total et 11% sur les activités golf pure (abonnements, green fees, practice, location…).
Malgré cela, grâce aux efforts des salariés des golfs, à des décalages d’investissement et aux divers dispositifs d’aides de l’état (8% du CA 2019 touchés en 2020 en moyenne), les clubs ont réussi à traverser cette crise unique sans hypothéquer l’avenir.
L’activité est bien repartie
La famille du golf est restée unie pendant la crise pour mieux défendre ses intérêts et promouvoir ses valeurs d’une seule voix auprès des pouvoirs publics avec d’autres activités de loisirs de plein air le cas échéant. Ces actions ont permis aux parcours de limiter les périodes de fermeture (qui auraient pu être alignés sur les restaurants, voire les sports pratiqués en intérieur) et de rouvrir ainsi en fin novembre 2020, n’hypothéquant à priori pas 2021.
Malgré la fermeture des bars et restaurants jusqu’au 19 mai, l’activité est bien repartie en 2021. Ainsi, sur le premier semestre, l’activité est en forte augmentation par rapport à 2020, mais surtout aussi en progression de 4% par rapport à 2019 – ce qui est assez remarquable. Sur le second semestre la progression de l’activité moyenne est sur une tendance supérieure à 5% en moyenne, ce qui est très positif même si cela cache des disparités importantes. Les clubs dont l’activité est liée au tourisme international restent très pénalisés alors que ceux qui captent essentiellement une clientèle loisirs locale peuvent progresser au-delà, surtout sur le littoral –conséquences de nouveaux comportements liés à la crise du covid (télétravail permettant une nouvelle organisation des journées, résidences secondaires qui deviennent quasi principales…).
Les valeurs du golf
La période de confinement et la dynamique sociétale qu’elle a activé produit bien un effet bénéfique sur 2021 pour le golf et les activités et sports de plein air en général. Plus que jamais après avoir été « enfermés », les Français ont voulu être dehors, au cœur de la nature, s’amuser entre amis ou en famille… Autant de valeurs que le golf incarne parfaitement, bien au-delà de tous les préjugés habituels qui sont d’une autre époque, bien loin de la réalité.
La réalité est que le golf est amusant, bon pour la santé et bon pour le moral.
Les défis ne manquent pas, et d’abord la transition écologique
Les chiffres des licences 2021 confirment bien qu’il y a plus de golfeurs (le nombre de licenciés à la FF Golf va battre un record en 2021 avec plus de 430 000 licenciés) et surtout que la curiosité pour le golf est plus forte. En effet le nombre de création de licences sur une année pourrait s’approcher de records historiques avec plus de 45 000. Ce sont de bonnes nouvelles pour le golf après 10 ans de stagnation . Cette tendance doit néanmoins se confirmer en 2022 car les défis ne manquent pas pour les clubs, en particulier s’agissant de la transition écologique.
Et demain ?
Beaucoup de personnes ne pensaient pas devenir golfeurs. D’autres qui avaient laissé leurs clubs dans un garage les ont retrouvés avec bonheur. D’autres encore qui jouaient 5 fois par an jouent 5 fois par mois !
Nous avons rencontré aussi des jeunes qui se lancent à fond dans ce sport qu’ils croyaient réservé à des retraités. La notion de rapport au temps, à la santé et à la nature a changé avec la pandémie. Et c’est tant mieux pour le développement du golf.
On trouve dans les clubs beaucoup de solutions pour faire face à cet afflux de passionnés : tees oranges avancés pour les jeunes, horaires aménagés, séries en location, cotisations à tempérament etc.
Le revers de la médaille
Mais revers de la médaille, il y a aussi d’autres problèmes qui peuvent surgir : les principaux sont de trois ordres.
D’abord, ce phénomène ne doit pas être une mode qui sera aussi vite abandonnée qu’essayée. Aux golfs à savoir fidéliser les nouveaux entrants souvent éloignés de leur lieu de prédilection par obligation qui se sont mis au golf par défaut.
Ensuite, cet afflux a créé des embouteillages dans certains golfs déjà pleins. Dans certains secteurs géographiques comme au Pays basque, il devient très difficile d’obtenir des départs, même une semaine à l’avance, surtout si on veut jouer en groupe.
Enfin, le personnel n’a pas toujours les moyens suffisants pour répondre à cette demande, les exploitants hésitant à investir alors que l’avenir reste toujours incertain.
Sachez toute fois que les plus optimistes imaginent une nouvelle vague de construction de parcours pour accueillir les adeptes de ce premier sport individuel dans le monde !
Combien de golfs dans le monde ?
Selon NGF, on compte environ 38 000 parcours dans le monde, présents dans 82% des pays répertoriés : soit 206 pays sur 251.
Un sport donc très représenté sur l’ensemble de la planète mais dont l’essentiel des parcours – 80% – est concentré sur une dizaine de pays développés.
Avec une statistique qui explique aussi le succès du golf aux USA : contrairement à ce que l’on peut penser, 75% des parcours y sont publics.
Photo couverture The Champions Course – Evian Resort Golf club