Chaque semaine ou presque sur les circuits professionnels, des joueurs ou des joueuses dénoncent les problèmes de jeu lent de leurs petits camarades. Ce fléau touche beaucoup les « pros », à l’image de Bryson DeChambeau, le vainqueur de l’US Open. Mais également les golfeurs du dimanche que nous sommes…
Cinq heures et 16 minutes. Pour 18 trous. Vous avez bien lu, il a fallu 5h16 au dernier groupe du dernier Women’s Scottish Open début août pour jouer 18 trous de golf. Sans interruption de jeu. Avant même le début de ce dernier tour, l’Américaine Stacey Lewis, la future gagnante, avait expliqué qu’elle savait à quoi s’attendre. « Le plus grand défi pour moi sera de ne pas me laisser affecter par l’extrême lenteur du jeu. Ce n’est pas en ma faveur. Mais je sais que je vais jouer avec deux joueuses très, très lentes. »
5h16 pour 18 trous !
La jeune maman avait déjà partagé sa partie du samedi avec l’Espagnole Azahara Munoz et sa compatriote Jennifer Song. Elle n’a pas hésité à les citer nommément. Cela ne l’a pas empêché de remporter son 13e titre sur le circuit LPGA, au terme d’un play-off. Pour les courageux qui auront regardé le dernier tour dans son intégralité, il aura donc fallu patienter plus de six heures devant son poste de télévision. Remède parfait à l’insomnie. Eddie Pepperell y était allé de son tweet assassin…
Le problème n’est bien sûr pas nouveau ni exclusif aux femmes. Il y a huit ans déjà, le Tour européen sortait une vidéo destinée à éradiquer le problème.
Sur le PGA Tour, Brooks Koepka a lui aussi dénoncé à haute voix l’incroyable lenteur de ses pairs il y a deux ans. J.B. Holmes avait été l’une de ses premières cibles, avant qu’il ne s’en prenne plus tard à Bryson DeChambeau, que Koepka adore asticoter et qui agace nombre de ses pairs sur ce sujet…
Dude. Putt already. @b_dechambeau pic.twitter.com/nf3WnQARiP
— Justin Rose (@JRoseWXYZ) August 10, 2019
« Je prends 15 secondes pour jouer, ces gars-là prenne plus de 1’30 » parfois, je n’arrive pas à comprendre, soufflait l’homme aux quatre Grand Chelem en 2019. Si ça continue, quand je vais jouer avec des joueurs lents, je vais faire comme eux et du coup, nous serons « timés » et pénalisés. Pénalisez-moi. Il faut faire quelque chose. »
La règle existe : le joueur ou la joueuse dispose de 60 secondes pour jouer son coup sur le PGA Tour (ce qui est déjà long…). Sauf que les pénalités pour jeu lent sont quasi inexistantes sur le Tour américain, alors que le Tour européen a davantage fait des efforts dans ce sens. Rory McIlroy a lui aussi exprimé son agacement il y a quelques mois devant le laxisme des arbitres sur ce sujet : « Les gars lents ont trop de chances de s’en sortir sur le PGA Tour, il faut un premier avertissement puis directement un coup de pénalité à la deuxième infraction. »
Sensibilisation, Ready golf mais pas de pénalité
Bryson DeChambeau a donc gagné l’US Open à Winger Foot, et même si sa performance est admirable à plus d’un titre, il est plus que jamais en première ligne pour donner le mauvais exemple : le Californien bodybuildé dépasse régulièrement le temps alloué pour jouer ses coups, en particulier sur les greens.
Le problème du jeu lent dans le golf a des répercussions à tous les étages. Côté professionnel, les diffusions télévisés sont plus ennuyeuses et plus difficiles à caler dans une grille de programmes. Côté amateur, c’est un cauchemar pour les golfs commerciaux, qui perdent forcément des départs si les parties de trois ou quatre joueurs dépassent les 4h30. Sans compter que des membres ou joueurs itinérants peuvent avoir tout simplement envie de stopper leur loisir. Venir au golf, s’échauffer un peu, jouer un 18 trous en cinq heures en patientant 5 minutes par trou, puis rentrer chez soi, faites le calcul : ce n’est plus un hobby, c’est un sacerdoce…
Les solutions ? La Fédération américaine avait lancé il y a quelques années une campagne de sensibilisation assez formidable intitulée « While we’re young » (tant qu’on est jeunes, tiré d’une réplique du cultissime film Caddyshack), où l’on voyait notamment des enfants chambrer Tiger Woods ou Arnold Palmer interpeller Clint Eastwood sur le temps qu’ils prenaient pour jouer.
Le « Ready golf » mis en place par le Royal & Ancient va aussi dans le très bon sens, même s’il n’est presque pas appliqué chez les « pros ». Des golfs tel le célèbre Carnoustie en Ecosse donnent des GPS aux joueurs pour surveiller en temps réel s’ils sont dans des temps de jeu « raisonnables » et envoient dare-dare un Marshall aux contrevenants.
Un jour dans un majeur…
C’est bien, mais d’évidence pas suffisant… On ne peut empêcher les joueurs du dimanche que nous sommes de vouloir reproduire ou tout au moins s’inspirer des champions qu’on voit à la télévision. Or pour la plupart ils montrent le mauvais exemple. Munoz, Na, DeChambeau, Holmes, mais aussi Jason Day, Jordan Spieth, Dustin Johnson sur les greens (on n’en peut plus de les voir consulter ces carnets de parcours qui indiquent les pentes !) sont coupables. Et bien d’autres. Et leur pêché a des répercussions bien plus graves que perturber leurs partenaires de jeu.
Un jour, il faudra agir. Le jour où un joueur perdra un Masters ou un British Open d’un coup de pénalité infligé par excès de lenteur, alors le monde professionnel aura compris. Et le monde amateur s’en portera mieux.