Définitivement disparu en 1952, le stymie faisait partie intégrante du jeu de golf depuis que les premières règles furent édictées. Pendant près de deux siècles, il nécessitait une certaine adresse au putting et occasionnait des coups de billard aujourd’hui disparus. Mais au fait, en quoi consistait-il ?
Par Sébastien BROCHU
Je vous parle d’un temps que les moins de 70 ans ne peuvent pas connaître : celui où le golfeur puttait par-dessus la balle de son adversaire pour atteindre le trou. De quoi donner des sueurs froides aux champions, mais pas autant qu’aux greenkeepers… Consécutive de règles anciennes, cette situation appelée stymie était considérée comme un aspect fondamental du jeu jusqu’en 1952, date à laquelle l’USGA et le R&A permirent de relever systématiquement les balles sur les greens.
Que signifie le terme stymie ?
Les dictionnaires anglais donnent une traduction précise du verbe : contrecarrer. Ils ajoutent néanmoins qu’il s’agit aussi d’une expression issue du golf qui signifie barrer le trou à. En l’occurence, quand un golfeur avait sa balle entre le trou et la ligne de putt de son adversaire, il barrait le trou à ce dernier. La règle empêchant de relever la balle, celui-ci n’avait alors que deux solutions : contourner la balle ou passer par-dessus celle-ci.
Et si l’on touchait l’autre balle ?
Aujourd’hui si l’on touche la balle de son adversaire, on encourt une pénalité de 2 coups en stroke-play mais aucune en match-play. Ce n’était pas le cas auparavant, l’auteur de la « faute » ne risquant rien. Quant au joueur « lésé », deux options s’ouvraient à lui : soit laisser la balle au nouvel emplacement, soit la replacer là où elle se trouvait avant d’être touchée. En revanche, si la balle était entrée dans le trou, son propriétaire pouvait noter le score sans ajouter de coup supplémentaire. Tout bénef, surtout pour ceux et celles victimes de yips !
Mais comment pouvait-on barrer le trou à ?
Cette question peut paraître aujourd’hui incongrue, puisque nous avons l’habitude de marquer notre balle dans toutes les situations. Mais avant 1952, ce n’était pas le cas pour des raisons à la fois stratégiques et surtout réglementaires, et ce depuis les premières lois de 1744 ! L’article 6 de l’époque stipulait en effet que l’on pouvait relever sa balle uniquement si elle touchait celle de son adversaire. Autrement dit, dans n’importe quelle autre situation, pas touche à la balle !
L’évolution du stymie a suivi celle des règles
Le stymie est donc né par défaut et il a évolué au fur et à mesure des aggiornamentos réglementaires. Parmi les plus importants, on peut citer celui de 1834 où le R&A, un an après avoir tenté de l’abolir, apporte une modification de taille. De 15 cm exactement : si la balle la plus proche du trou se retrouve à moins de 15 cm de l’autre, elle peut être relevée. Au-delà de 15 cm, pas touche à la balle !
Le stymie définit aussi la largeur des cartes de score
Dès 1891, les instances conviennent que le principe du stymie n’est plus adapté aux formules quatre balles et stroke-play. Mais il demeure bien présent dans la formule originelle du golf, celle du match-play, encore très populaire. Pour éviter tout litige entre les deux camps, les cartes de score avec une largeur de 15 cm s’étaient généralisées, ce qui était bien pratique pour évaluer si l’on pouvait relever sa balle ou non.
Le changement en provenance d’Amérique
En 1941, l’USGA adopte une modification de la règle : dorénavant toute balle située à moins de 15 cm du trou doit être relevée, quelle que soit la distance entre les balles. Neuf ans plus tard, en 1950, l’instance américaine autorise définitivement le fait de pouvoir relever la balle sur les greens, sans pour autant être suivie par le R&A. Il faudra attendre 1952 pour que les Britanniques suivent le courant et signe ainsi la mort du stymie, au grand dam du légendaire Bobby Jones qui en était un fervent adepte.
Désormais, les fabricants de marque-balles pouvaient laisser pleinement libre cours à leur imagination…