Consacré dans les années 1950, le mariage entre la télé et le golf a précisément été scellé en 1957 à cause d’une intervention extérieure, survenue à Saint Andrews lors du premier British Open retransmis en direct à la télévision.
Nous connaissons tous aujourd’hui l’importance des relations entre le golf et la télévision, pour le développement de l’un et la croissance de l’un et de l’autre. Après des fiançailles balbutiantes, cette union sacrée dure favorablement depuis plus de 70 ans.
Un premier direct avec une seule caméra
Le premier tournoi diffusé à la télévision a lieu en 1947 dans le Missouri, à Saint-Louis qui accueille l’US Open. Il ne s’agit que d’une diffusion locale. Il faut attendre 1952 pour connaitre une première nationale : en Angleterre, la BBC retransmet le Daks Tournament qui se déroule à Wentworth avec pour seul matériel une caméra située… au trou n°2.
Aucun téléspectateur n’a pu voir la victoire du Nord-Irlandais Fred Daly !
Le premier tournoi du Grand Chelem à recevoir les honneurs du direct est l’US Open 1954. La chaîne NBC est présente pendant une heure lors du dernier tour remporté par l’Américain Ed Furgol.
Le dispositif est plus important quand la BBC consent en 1957 à diffuser pour la première fois le British Open qui se déroule à Saint Andrews. Grâce à la présence de la télévision, le plus ancien Majeur connait une évolution importante : les leaders des premiers 36 trous sont désormais associés pour jouer les deux tours suivants, alors que précédemment ils étaient soumis au tirage au sort. Ainsi nait le suspense télévisuel au golf !
L’erreur de Bobby Locke visionnée au sein même du R&A
En ce vendredi 5 juillet 1957, un incident va déjà faire basculer la retransmission dans le monde télévisuel moderne. Leader incontesté, le Sud-Africain Bobby Locke, toujours considéré à 39 ans comme l’un des meilleurs au monde au putter, a quatre coups au green du 18 pour remporter son 4e Open. Et le trou n’est distant que de 1,20 m… Son partenaire du jour, l’Australien Bruce Crampton lui demande au préalable de décaler sa marque d’une tête de putter pour pouvoir terminer sa partie. Surnommé « Old Muffin Face », l’impassible Locke s’exécute, mais oublie ensuite de remettre sa pièce à la bonne place lorsqu’il enquille à son tour pour remporter le tournoi.
L’éthique et l’esprit du jeu préservés
Personne n’a remarqué l’erreur, personne sauf Gerald Micklem, ancien grand joueur amateur. Membre très influent du Royal & Ancient (il en deviendra le Captain dix ans plus tard), il regardait la fin de la partie à la télévision lorsqu’il constata la faute. Un coup de fil plus tard, tel un VAR avant la lettre, le comité du tournoi se pencha sur la question après la remise des prix. L’enjeu est de taille : un tel manquement valait ni plus ni moins que la disqualification !
Le visage de marbre de Bobby Locke a dû laisser transparaître quelques rougeurs voire quelques gouttes de sueurs même si le Sud-Af’ avait déjà soulevé la Claret Jug, enfilé sa veste et rangé son plus fours noir favori dans sa valise. Après visionnage des images, également décortiquées par l’Australien Peter Thomson second et potentiel vainqueur par « contumace », le comité met fin à la polémique naissante : « Le R&A a décidé que compte tenu de son avance de trois coups et du fait qu’aucun avantage n’ait été acquis (en laissant sa marque à la mauvaise place), l’équité et l’esprit du jeu imposent qu’il n’y ait pas de disqualification ».
Ainsi s’achève la première polémique née de l’image audiovisuelle, cinquante ans avant l’explosion du phénomène sur les réseaux sociaux. Furieusement tendance, non ?