Les gestionnaires de parcours de golfs hexagonaux peuvent être rassurés. La loi Labbé s’appliquera certes comme prévu au 1er janvier 2025 pour tous les terrains de sport engazonnés, mais le législateur avait prévu des dérogations si aucun produit de biocontrôle ne permettaient de remplacer efficacement les produits phytosanitaires. Un joker qui sera logiquement utilisé après des discussions constructives avec les ministères concernés… même si les dernières modalités de durée de dérogation sont encore en cours de discussion.
David CHARPENET
Après une première lettre rassurante de la part de la Fédération Française de Golf destinée aux gestionnaires de golfs, envoyée comme annoncée dans la foulée des Jeux olympiques de Paris 2024, les informations continuent d’être rassurantes pour les gestionnaires de golf.
Votée en 2014, la loi Labbé interdisant l’utilisation des produits phytosanitaires sur les terrains de sport engazonnés au 1er janvier 2025 sera appliquée « en douceur ». Les greenkeepers craignaient en effet une application stricte de la loi, alors même que le législateur avait tenu à inscrire une possibilité de dérogation dans le texte d’origine… de 2014.
Retrouvez l’interview complète de Joël Labbé
Une première lettre rassurante dans la foulée des JO
La lettre de Pascal Grizot que nous nous sommes procurée, envoyée aux gestionnaires de golf dans la foulée des JO de Paris 2024, était venue rassurer la filière golfique en rappelant quatre axes d’actions : une feuille de route élaborée à partir d’un diagnostic complet, la recherche de solutions avec notamment l’AGREF (Association des Personnels d’Entretien des Terrains de Golf) et le consortium SPOR&D (Sol Pelouse Organisme de Recherche & Développement) qui regroupe l’ensemble des filières sportives impliquées avec le football, l’hippisme, le tennis et le rugby, (également concernés par l’application de la loi Labbé), la formation du personnel et enfin l’élaboration de la liste dérogatoire prévue par la loi.
Si la recherche et la formation du personnel s’inscrivent dans la durée, il fallait que la liste de produits dérogatoires soit élaborée avant le 31 décembre 2024, afin de ne pas abandonner les gestionnaires de golf dans un halo nimbé d’incertitudes.
Les instances sont claires : moins de produits phytopharmaceutiques oui, mais pas au détriment de la qualité du jeu. La FFG préconise ainsi de « s’assurer de la comptabilité des produits phytosanitaires avec les enjeux environnementaux », de diminuer ces derniers « en préservant la qualité des surfaces de jeu. »
Une réunion constructive et consensuelle en novembre
Face malheureusement aux impasses techniques et scientifiques avérées, les six usages proposés par les filières sportives ont tous été retenus par le ministère des sports et de l’écologie lors d’une réunion début novembre. Un consensus fortement rassurant pour l’ensemble des représentants du golf et des autres sports concernés.
Les fongicides, qui préoccupent principalement les greenkeepers pour combattre sur les greens les champignons responsables de la fusariose et du dollar spot notamment, seront toujours autorisés puisqu’aucun produit de biocontrôle n’a pu faire la preuve de son efficacité.
Pour rappel, la dérogation concernant les terrains de golf ne s’applique que sur les départs, les fairways… et bien entendu les greens qui concentrent la quasi totalité des produits phytosanitaires utilisés. La durée de la validité de la dérogation reste néanmoins toujours en discussion.
Les différentes parties ont proposé entre un et trois ans de dérogation reconductible, mais le principe d’une liste d’usages dérogatoires est d’ores et déjà acquis. « Tout le monde était unanimement d’accord pour une liste d’usages dérogatoires d’au moins un an », dévoilait Rémy Dorbeau, directeur du golf de Chantilly et président de l’AGREF et d’Écoumène.
Des discussions toujours en cours… et un futur à écrire
La durée de la dérogation doit permettre aux différents organismes de trouver des solutions de biocontrôle susceptibles de remplacer les produits phytosanitaires. Et si la recherche est déjà activement mise en place avec l’AGREF & Écoumène ou encore SPOR&D, aidés par des organismes publiques comme l’INRAe, pour trouver des solutions biologiques sur les différents terrains de sport engazonnés, il faut du temps en l’état actuel des connaissances scientifiques.
Les différentes parties l’ont bien compris et quelle que soit la durée de la dérogation, elle semble vouée à être reconduite, tant que les solutions n’ont pas été scientifiquement trouvées et éprouvées. « Pour ce genre de projet de recherche complexe, on peut tabler sur au minimum cinq années pour trouver les solutions et les tester avant leurs mises en application », rappelait Gérard Rougier, directeur Territoires, environnement et équipements à la FFGolf et Coordonnateur de SPOR&D
Tous les golfeurs, tous les gestionnaires de golfs et tous les membres des différentes fédérations concernées par la loi Labbé rêvent de gazons naturels sans produits phytosanitaires. Nous essaierons de comprendre dans de prochains articles pourquoi les solutions sont difficiles à trouver… et à mettre en œuvre. Mais l’annonce de la liste dérogatoire se veut rassurante pour les gestionnaires de golfs, en rappelant que la transition écologique continue sa marche en avant, sans brusquer un modèle menacé par les changements environnementaux.
Photo : Christophe Lehenaff / Photononstop / AFP